Fédéral
Avril  2011 


Le Conseil en Russie
Interview : Svetlana & Evgeny Emelyanov
CEO & Pdt, ASCONCO

Евгений и Светлана Емельяновы
Ассоциация консалтинговых компаний России
АСКОНКО

Svetlana et Evgeny Emelyanov sont respectivement la Directrice exécutive et le Président de STEP Consulting (www.stepcons.com/), un cabinet conseil basé à Moscou. En 2007 ils ont fondé ASCONCO (www.asconco.ru), la première association russe dédiée aux sociétés de conseil. Récemment ASCONCO a consolidé les premières données connues concernant le marché russe du conseil en management (cf. rapport en cours de traduction). Comme la plupart des marchés du conseil, après la crise économique de 2008, le marché russe du conseil en management a été touché par la récession. Toutefois, même si ce ce marché ne reprend pas encore toute sa vigueur, sauf dans certaines spécialités, il offre un  potentiel de développement pour les entreprises étrangères spécialisées. En cette époque de changements stratégiques majeurs, sur des terrains de bataille qui se sont globalisés, le marché russe présente des opportunités que les cabinets conseil ouest-européens feraient bien de saisir avant que d’autres ne le fassent.

Svetlana et Evgeny, le conseil se développe en Russie. Quelles sont les caractéristiques principales de ce marché et comment se compare-t-il avec avec les principaux marchés européens, notamment dans la crise actuelle?

Svetlana & Evgeny Emeliyanov : Depuis le début de la crise, le moins que l’on puisse dire c’est que le développement du conseil en Russie a ralenti.  Les sociétés de conseil ont fait l’expérience des mêmes difficultés que celles de leurs clients. Les prix de l’heure du conseil ont pris un profil descendant et les spécifications fixées aux répondants des appels d’offre sont devenues plus exigeantes. Il en est allé de même du désire des clients, de bénéficier de conseils toujours plus divers et variés, pour cependant le même prix.  Le nombre de sociétés agissant sur le marché s’est donc réduit. Une bonne part de celles-ci ont gelé leurs activités et se trouvent en état d’anabiose, une autre part ayant dû se séparer parfois jusqu’à 50% de ses équipes.  Nous n’avons pu observer de cas de large croissance.  Le seul secteur qui soit resté florissant et sans difficultés est le conseil en technologies de l’Information. A noter que le marché russe est insuffisamment segmenté. Le processus de spécialisation des cabinets était en cours mais avec la crise il a été suspendu.


Donc un marché de généralistes, voire de multi spécialistes… Comment se répartit ce marché entre les Big Five, les grosses sociétiés de conseil russes et les petites structures locales ?

Svetlana & Evgeny Emeliyanov : Le gros du marché se partage entre les grandes sociétés et les Freelancers. Les sociétés de taille intermédiaire ne prennent qu’une  part congrue du marché. Dans le secteur de l’IT il existe de grands noms du conseil russe tels que Парус (Parous www.parus.ru/), Фирма 1С (FIRMA 1C www.1c.ru/ www.1c.ru/eng/title.htm), IBS (Informational Business Systems www.ibs-company.com/). Même chose pour le recrutement et la chasse de têtes, où la marque la plus connue des grandes sociétés russes est АНКОР (ANCOR ancor-group.comancor.ru/). Dans le conseil en management on trouve des Big Five et des petites structures locales. Dans le conseil  financier et l’audit on retrouve des Big Five et de grands noms russes, comme par exemple ФБК (FBK Company, qui apparaît aussi sous le nom PKF pkfmoscow.com/).


La crise devrait durer longtemps mais quelques signes avant coureurs de reprise ont déjà pu être observés en Europe de l’Ouest. Avez-vous remarqué un rebond sur le marché du conseil russe? Y-a-t-il des changements dans la forme de ces marchés depuis le début de la crise ? 

Svetlana & Evgeny Emeliyanov : On peut observer divers signes d’amélioration de la situation dans certains secteurs du marché du conseil russe. Dans d’autres secteurs il n’y a pas de telle amélioration, mais tout au contraire on constate une dégradation en 2010 par rapport à 2009 (cf. rapport en cours de traduction). Quoi qu’il en soit, la crise n’a pas été un appel urgent à la réforme structurelle de l’économie russe. Au cours de la période qui s’est écoulée la pression extérieure sur les affaires en Russie s’est accrue et les termes de son fonctionnement ont empiré. 


Dérégulation, privatisations, d’un côté, montée en puissance de sociétiés monopolistiques (dans l’énergie par exemple) et de conglomérats de l’autre… Qu’en est-il réellement et cela impacte-t-il la possibilité de réaliser du conseil en Russie ? Le conseil est-il exclu du marché des grandes entreprises ? Y a-t-il une importante séparation entre le privé, le public et les organisations publiques locales ?

Svetlana & Evgeny Emeliyanov : Il n’y a pas de différence significative entre les entreprises d’Etat et celles qui sont privées. Personne n’empêche les consultants de travailler avec de larges organisations.
 

Depuis 1989 la Russie a vu le développement d’une importante classe moyenne. Cela est-il le moteur réel du développement de certaines spécialités comme le marketing, les enquêtes mystère, la stratégie de marchés, l’évaluation de la compétitivité..?

Svetlana & Evgeny Emeliyanov : Oui, de façon certaine. Ces spécialités sont enseignées dans des instituts, les universités et dans de nombreux centres de formation sur l’ensemble du pays.


Est-ce que le coaching, le conseil en  ressources humaines et en recrutement se sont développés comme dans l’Europe de l’Ouest ?

Svetlana & Evgeny Emeliyanov : En Russie ces secteurs se développent pareillement  et avec succès (Cf. ANCOR).


Même question pour l’innovation et la R&D. Est-ce que le marché est prêt pour ce genre de conseil où la R&D est-elle encore trop confinée au sein des institutions d’Etat et l’Université pour devenir vraiment un sujet de sociétié privée ?

Svetlana & Evgeny Emeliyanov : l’innovation et la R&D ont toujours été très populaires en Russie.  Elles ont été développées dans des instituts de recherche, mais par la suite aussi dans des sociétés privées. Au cours de ces dernières années  la modernisation est devenu le slogan du gouvernement russe, et elle est activement mise en place, et il en va de même dans les sociétés d’Etat.


Cette modernisation passe par les cabinets conseils et c’est peut-être là qu’intervient l’ASCONCO, l’association que vous avez développée pour regrouper les cabinets de la Fédération de Russie…

Svetlana & Evgeny Emeliyanov :  ASCONCO est un accronyme pour Association des Sociétés de Conseil Russes (АСКОНКО, Ассоциация консалтинговых компаний России / Assotsiatsia Konsaltingovouihr kompanii Rassii ). Elle a été fondée en 2007 par 3 cabinets : Step Consulting à Moscou (www.stepcons.com/ qui apparait aussi sous le nom russe de КОНСАЛТИНГ-ЦЕНТРА ШАГ Konsoulting/Tsientra JAG www.stepconsulting.ru/index.shtml), 2L: Logistics Logic à Moscou (), et ALT R&D à St.-Petersbourg (). ASCONCO a reçu son enregistrement officiel en 2008. Les fondateurs de l’ASCONCO ont participé aux conférences annuelles organisées par la fédération européenne FEACO depuis 2006  (Budapest). 


Peut-on en savoir plus sur les objectifs que s'est défini l’ASCONCO pour ses membres comme pour la profession de conseil en général ?

Svetlana & Evgeny Emeliyanov :  L’ ASCONCO est une alliance de bonnes volontés   entre des sociétés de conseil qui rassemblent leurs ressources pour constituer un marché civil du conseil au sein de la Fédération de Russie. Les membres de l’ASCONCO réalisent que la conduite efficace d’activités de conseil dans un marché hautement fragmenté présentant un niveau d’entrée extrêmement bas est une tâche difficile.  C’est la raison pour laquelle notre objectif est que l’ASCONCO devienne une marque associée à une haute qualité de services dans le conseil.

D’un autre côté, l’ASCONCO de manière permanente conduit un travail visant à rejoindre les efforts de l’European Federation of Management Consultancies Associations (FEACO). Ceci a pour conséquence que les membres de l’ASCONCO, dans le cadre de leur activité conseil, sont obligés de suivre les standards éthiques et professionnels de nos collègues européens. Ceci devrait leur permettre de développer une image de partenaires responsables et durables dans le cadre des interventions qu’ils peuvent avoir sur le marché russe.  

Pour les mêmes raisons ASCONCO lutte afin de protéger les intérêts du marché du conseil, en plein développement, à tous les niveaux possibles, ce qui inclut celui de l’administration publique. 


Que mettez-vous en place, concrètement, pour atteindre ces objectifs ?

Svetlana & Evgeny Emeliyanov : Pour réaliser cette mission, l’ASCONCO conduit un travail interne majeur. Les membres de l’ASCONCO se réunissent régulièrement dans des seminaries et des conferences, où ils ont la possibilité d’échanger sur leur expérience professionnelle. Ils ont aussi la possibilité d’être impliqués dans les travaux de la FEACO et de valoriser leur experience avec celles de leurs collègues russes et internationaux. L’ASCONCO établit un échange d’information intense entre ses membres à la fois via des communications d’actualité, internes et externes. Le point fort de l’ASCONCO c’est de militer pour une diversité professionnelle maximum et une large représentation régionale de ses membres. La spécialisation des membres de l’ASCONCO sur une large palette d’activités de conseil procure ainsi l’opportunité tout à fait unique de pouvoir créer des alliances entre partenaires divers et d’intégrer différentes sociétés dans la réalisation de projets de conseil extensifs et complexes.  


Si un cabinet d’Européen souhaitait se développer en Russie, quels seraient vos conseils?  Serait-il nécessaire d’ouvrir un bureau à Moscou ou à Saint Petersbourg? Avoir des bureaux ou des partenaires locaux ? Venir avec ses clients est-il la seule option possible ?

Svetlana & Evgeny Emeliyanov : ceux qui le souhaitent peuvent venir et démarrer leur activité. Si l’on met de côté les Big Five il y a plein de sociétés de conseil  florissantes travaillant en Russie dans des secteurs tels que le conseil juridique, le conseil en systèmes d’information, la protection des marques ou encore la formation… Il n’est pas nécessaire d’ouvrir sur place des bureaux. Il est possible de travailler avec un bureau d’intérim ou via un cabinet russe, comme par exemple  les cabinets ALT R&D Company  et  Global Intelligence Alliance. Il n’est pas nécessaire d’entrer sur ce marché en apportant ses propres clients. Rien n’empêche de pouvoir diffuser ses activités de conseil sur place. A titre d’exemple des Grecques et des Indiens se sont adressés à STEP Consulting pour l’organisation de leurs séminaires promotionnels. John Van Eiken (Джон Вон Эйкен), consultant et orateur connu dans les domaines de la stratégie, de l’organisation et du commerce, a par exemple réussi avec succès l’organisation de ses propres ventes grâce à l’appui d’un cabinet local.


Comment le système bancaire travaille-t-il avec les cabinets conseil ? Est-ce complexe, ou encore difficile de financer les projets des clients ? 

Svetlana & Evgeny Emeliyanov :
Pour les cabinets d’Europe de l’Est, le plus simple serait de travailler avec les bureaux russes des banques de l’Est. Elles sont nombreuses à être représentées en Russie.


D’un point de vue stratégique, est-ce que la Russie est une plate-forme à partir de laquelle il est possible de déveloper de l’activité vers des marchés extérieurs (Comme la Grèce pour les Balkans ou Hong Kong pour le marché asiatique) ?   

Svetlana & Evgeny Emeliyanov : Oui, c’est tout à fait possible.
 

En 2009 la Russie a tenu le premier sommet des BRISC (Brésil, Russie, Inde, Chine) à Ekaterinbourg. Commet le conseil peut-il aider la Russie à développer des positions de Leadership commercial sur les marchés internationaux ?

Svetlana & Evgeny Emeliyanov :
Beaucoup d’entreprises [russes] sont intéressées à participer à la communauté du Business international. Le travail avec les consultants en organisation  russes permet justement aux entreprises d’être plus attractives pour les partenaires étrangers comme pour les investisseurs.


S’il devait y avoir un dernier conseil pour les consultants qui sont intéressés par une entrée sur le marché du conseil russe, que pourrait-il bien être ?

Svetlana & Evgeny Emeliyanov : Qu’ils viennent vraiment et qu’ils essaient. Tous ceux qui ont voulu entré sur le marché russe "s’y sont mis". Et après cette introduction, le reste est comme pour tout Business : vous devrez avoir à l’esprit ce que vous souhaitez proposer, et déterminer à qui vous souhaiter le vendre. L’expérience acquise avec nos collègues d’Europe de l’Est qui pensaient que leur simple apparition sur la scène russe présenterait un intérêt  pour les clients russes a montré que c’était une erreur d’appréciation. Il est en effet nécessaire de comprendre les besoins propres des clients russes et d’offrir une proposition qui va dans ce sens. De plus nous ressentons que nos clients ont un  intérêt marqué pour du conseil sur des expertises spécialisées dans des domaines pointus tels que l’ingénierie, la construction, l’agriculture etc… au meilleur niveau car la demande en Benchmarking s’accroît.  C’est la raison pour laquelle l’ASCONCO sera heureuse d’accueillir de nouveaux Partnerships dans tous les domaines.

Svetlana et Evgeny, merci pour ces conseils et gageons qu’ils seront utiles aux lecteurs qui se rapprocherons de l’ASCONCO afin de démarrer leur activité conseil dans la Fédération de Russie.


Propos recueillis par Bertrand Villeret
Rédacteur en chef, ConsultingNewsLine


Pour info :
ASCONCO

www.stepcons.com/

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En préparation

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Rapport
Marché du conseil en Russie : en préparation

Images :
Courtoisie Svetlana et Evgeny Emelianov,  Moscou 2011


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