Etude Celerant Consulting TNS-SOFRES sur le Marché du
Conseil: Tendances et Facteurs Déterminants
Le 23
janvier 2004 Celerant Consulting dévoilait lors d'une
conférence de presse les résultats d'une
enquête menée à sa demande par TNS-Sofres sur le
marché du conseil. L'événement est en soi majeur
puisqu'il est rare qu'un cabinet dévoile les
résultats d'une enquête conjoncturelle concernant son
propre secteur. La percée remarquable du cabinet de la rue de
Monceau dans un contexte difficile n'y est certainement pas
étranger.
En une période de remise en
question du secteur conseil dont le Chiffre d’Affaire est globalement
en récession depuis 2002 et dont 50% de l’activité
à ces 5 dernières années changé de main
suite aux diverses restructurations et rachats, notammrnt par des
groupes d’informatique, les rapports visant à ausculter le
patient ont tout particulièrement abondé ces derniers
temps : Rapport Feaco 2003 (chiffres 2002) sur les divers aspect du
marché européen, mettant en avant le déclin
économique du secteur et sa variabilité d’un pays
à l’autre ; Rapport Syntec Conseil en Management donnant
tous les chiffres pour la France, document complété par
celui de Syntec informatique ; Enquête de la CCIP des Hauts
de Seine présentée début 2004 sur le Conseil en
Ile de France ; Etude du Kennedy Group sur le conseil aux USA (et
dans le monde) dont certains extraits ont été largement
commentés lors du Congrès annuel de la Feaco à
Lubliana ... Aussi, l’étude que vient de présenter
Celerant Consulting complète les rapports économiques
déjà publiés et propose une intéressante
évaluation de l’évolution de la demande telle qu’elle
est vue par les utilisateurs dconseil au travers d’une analyse
comparative des tendances et des facteurs clés de succès
aux USA et dans les divers Pays d’Europe. Pour Pascal Ansart, le
Directeur Général France de Celerant Consulting, cette
étude avait pour but principal : « d’évaluer la
pertinence de 4 postulats ». D’une par « la perception par
les cabinets conseil d’un déplacement de la demande de la
stratégie vers la mise en œuvre », point
particulièrement sensible pour Celerant Consulting qui se
définit comme un cabinet de conseil opérationnel «
proposant des services qui vont de la stratégie jusqu'à
à la mise en œuvre ». D’autre part, l’enquête devait
permettre de qualifier le sentiment qu’au delà des conditions
économiques actuelles, « le déplacement
observé résultait d’un besoin de services concrets
conduisant à une efficacité accrue des l’entreprises
», ce que d’autres opérateurs auraient pu présenter
sous le couvert d’expressions telles que « valeur ajoutée
pour le client », ou encore « résultats rapides et
durables » ... Ensuite l’étude se proposait
d’évaluer un postulat en passe de devenir tenace avec la
montée en puissance des Services Achats dans le processus de
sélection des cabinets, postulat selon lequel : « la
rémunération basée sur le résultat, [les
fameuses Success Fees] serait devenue le mode principal de paiement des
consultants». Et enfin pour clore cette liste de « vraies
bonnes questions opérationnelles », il devait
être procédé à l’évaluation du
« défi que représenterait pour les Dirigeants la
phase de mise en œuvre des projets de conduite du changement
». Pour ce faire Celerant Consulting n’a pas donc
hésité à sortir l’artillerie lourde.
L’enquête menée par TNS-Sofres en collaboration avec le
cabinet courant avril 2003 a en effet porté sur pas moins de 700
dirigeants d’entreprises répartis entre le
Bénélux, la France (~ 100 personnes), l’Allemagne, la
Grande Bretagne, la Scandinavie et les USA, lesquels Dirigeants ont
tous été questionnés selon un protocole CATI
(Computer Assisted Telephone Interview).
Il y a
déplacement de la stratégie vers la mise en œuvre
Clairement l’Etude
TNS-Sofres montre un déplacement de la stratégie vers la
mise en oeuvre, ce point étant reconnu par 47% des
répondants aux USA et de façon moindre (34%) au pays des
35 Heures. Commentant ce résultat, Pascal Ansart nous indique :
« on veut des résultats, oui, mais durables. Les clients
ne veulent pas de One Shot lorsqu’ils engagent l’entreprise ».
Ainsi en moyenne 73% des entreprises pensent que le succès d’un
cabinet tiendrait principalement à son orientation vers
l’atteinte de résultats puis pour 63% à une orientation
vers la pratique. Autre point intéressant l’enquête
montre, tout particulièrement en France, que les connaissances
sectorielles sont reconnues avant toute chose comme « le »
critère de choix pour retenir un cabinet (46%), et ce loin
devant les traditionnels éléments méthodologiques
et comportementaux dont souvent la s’enorgueillit la profession, tels
que la capacité à définir un programme (25%), la
capacité à mobiliser (16%) et la disponibilité des
ressources (12% seulement). Pour ce dernier chiffre toutefois, à
une époque d’externalisation accélérée on
peut se demander si les répondants n’ont sous(estimé ce
point. Aussi l’interprétation mérite quelques ajustements
qualitatifs. Pour Pascal Ansart cependant la lecture est
stratégiquement claire et se fait au deuxième ordre. Pour
lui, de toutes évidences : « si l’on ne connaît pas
un secteur ce n’est pas la peine ! Mais ce qui fait la
différence c’est la capacité à définir le
programme de changement. Sur ce point les entreprises françaises
sont plus fines et plus larges dans leurs attentes que leurs homologues
US qui se fient essentiellement à la connaissance du secteur
». D’une certaine manière le marché
français serait donc « plus mature ». S’agissant
maintenant de la rémunération aux Success Fees, la
surprise est de taille : en moyenne 20% seulement indiquent
rémunérer de cette manière (25% en France, ce qui
n’est pas négligeable) mais les USA avec 15% font, Scandinavie
mise à part, figure de bon derniers ! Pascal Ansart : « on
pense souvent que les USA sont précurseurs mais hormis les
scandinaves la part variable est de loin la moins importante aux USA .
Cela a été proposé là-bas il y a une
trentaine d’années mais c’est resté très marginal.
Ce type de rémunération a été bien
accepté en France, Allemagne et Angleterre mais sur des
critères bien spécifiques et différents pour
l’Europe ». Lorsque l’enquête aborde les raisons qui
peuvent pousser à l’usage de Success Fees le schéma se
complique un peu : l’amélioration de l’efficacité est
citée majoritairement sur l’ensemble du panel (61%) et
massivement aux USA (77%), alors que la France préfère y
substituer l’amélioration de la qualité (64%) qui n’est
pourtant que le troisième critère retenu par le panel.
Pascal Ansart apporte sur ce point son éclairage : « aux
USA on est centré sur les coûts. L’appréciation est
plus large en Europe : l’efficacité économique (Business
Case), les Sastisfaction Fees (jugement de Salomon), les Obtention Fees
(sur des résultats intermédiaires concrets). Ces
modalités sont en cours de développement et Celerant y a
travaillé. Celà fait partie de notre Mind Set
». Enfin pour ce qui est de la mise en oeuvre et
l’accompagnement du changement, qui forme la dernière question ,
il est clair qu’avec 55% des réponses elle fait partout figure
de phase la plus importante des missions (y compris en France avec
39%), par opposition aux phases amont telles que la validation de la
stratégie, la définition des changements et la
planification des actions. A noter toutefois qu’en France la
deuxième phase « d’analyse des améliorations
nécessaires et de définition des changements à
entreprendre » n’est pas loin derrière (35%),
contrairement à l’ensemble des autres pays. Pour expliquer cela
Pascal Ansart rapporte cette caractéristique à la
façon dont les entrepreneurs hexagonaux apprécieraient la
gestion des coûts en rapport avec ce qui est mis en place :
« sur les coûts on a travaillé beaucoup en France.
La recherche de compétitivité y devient complexe. Il faut
faire au moindre coût, mais cela nécessite plus
d’analyses, l’identification des bons leviers du changement. En France
on attend de l’implication afin que les ressources du client portent le
changement. C’est différent d’il y a 10 ans où l’on avait
des armées de consultants. Le client aujourd’hui est
engagé dés le départ et engage ses ressources. Ce
n’est pas comme en Allemagne où l’on reste centré sur le
résultat avec des phases de diagnostic très courtes : 3
semaines de diagnostics contre 6 mois en France ». S’agissant des
principaux écueils à la réussite des missions de
changement, les différences entre la France et l’Allemagne font
l’objet de remarques qualitatives : Ainsi aujourd’hui les échecs
seraient assez rares mais feraient apparaître des
différences assez nettes. On serait plus Top-Down en
Allemagne alors qu’en France la nécessité de
mobilisation serait plus forte. L’étude ne dit pas si le
consensus cher aux pratiques sociales et syndicales allemandes en
serait à l’origine. Dans un moment de satisfaction tout ce qu’il
y a de plus hexagonal Pascal Ansart interprète les chiffres
comme suivant : « soit les consultants en France sont meilleurs,
soit les dirigeants le sont ou achètent mieux leurs prestations
». Pour ce qui est des écueils rencontrés lors des
missions, autre point important que l’enquête cherchait à
éclaircir, de manière majoritaire le « manque
d’engagement des collaborateurs » arrive au tout premier plan
(57%) suivi de près par la notion d’écart entre
théorie et pratique (55%). A noter cependant que les «
difficultés d’engagement des dirigeants » (37% en moyenne
et 23% en France) qui forment une alternative moins retenue a peut
être été un peu sous évalué, les
Dirigeants étant à priori les répondants de
l’enquête et le terme « difficultés »
substitué au terme « manque » introduisant une
dissymétrie sémantique dans le questionnement. Pour ce
qui est des facteurs clefs de succès qui forment une ultime et
symbolique question, là, unanimité écrasante, 90%
des interviewés répondent : « un conseil fortement
orienté sur des résultats mesurables » ! Une
unanimité qui fait dire à Hemza Benmiloud, Research
Manager de TNS - Sofres : « la demande sur les résultats
mesurables vient en tout premier », propos auxquels Pascal Ansart
fait écho en concluant « on a bien là confirmation
qu’il y a attente de résultats ». Une déclaration
incontournable en effet, mais dont l’écrasante unanimité
nous semble résulter quelque peu d’un manque de concurrence dans
les alternatives de réponses proposées. Car devoir
trancher entre « un conseil fortement orienté vers des
résultats mesurables » ; « Une grande
compréhension de tous les process commerciaux du client »
; « Des concepts efficaces de restructuration », « La
réduction de la Durée de réalisation du projet
» et, pour finir, « un conseil en stratégie et en
implémentation proposé par une seule et même
société » revient d’une certaine manière
à demander à des vacanciers : « voulez-vous une
seule compagnie aérienne, un trajet pas trop long, des pilotes
efficaces, du personnel de cabine qui vous comprenne bien ou des
vacances réussies » ? Réponse : « des
vacances réussies » (et plutôt orientées vers
le soleil). Cela dit cette enquête a le mérite d’avoir
bien posé les questions essentielles sur les subtilités
du comportement des clients, lequel comportement détermine la
réussite ou l’échec dans ce marché difficile.
Aussi, Bravo ! A ce stade des résultats le staff de Celerant
Consulting peut alors aborder la validité des postulats de
départ. Ainsi il apparaît très clairement qu’il
existe bien un « glissement de la stratégie vers la mise
en œuvre », qu’ensuite le contexte économique et
« la recherche de résultats concrets poussent bien vers un
conseil opérationnel », que « par contre les clients
ne s’orientent pas tant que cela vers une rémunération
basée sur le succès des missions, notamment aux USA
» et qu’enfin « si la phase de mise en œuvre est bien de
loin la plus difficile, elle n’est pas la seule, surtout en France
où les options stratégiques sont déterminantes
», même s’il est clair que la mise en œuvre devient de plus
en plus difficile. Les différences significatives entre les
divers pays d’Europe et les USA qui ressortent de l’étude sont
là aussi pour rappeler que le conseil reste bien une pratique de
culture locale dans un monde global. Celerant Consulting rappelle
à cette occasion qu’il existe une « exception
française », faite de pragmatisme, de finesse et d’une
réalité différente. Ainsi le cabinet dans les
conclusions de son rapport met en avant « une importance
portée sur des résultats durables ... partagés par
l’ensemble des collaborateurs » et reconnaît un
élément qui risque d’être déterminant dans
l’avenir : « des entreprises qui deviennent matures dans
leurs achats de conseil ». Celerant Consulting en tire 3
conséquences pour son action, 3 « Défis », et
c’est tout à son honneur que de porter ces appréciations
à l’attention de la presse et de ses confrères.
Défi n°1, la nécessité [absolue] de s’engager
sur des résultats mesurables et durables. Défi n°2,
la Nécessité de faire vivre un modèle de
capitalisation homogène de dimension internationale. Défi
n°3, la nécessité de développer une approche
Front End « sur mesure » et de professionnaliser le Back
Office (méthodlogie, Knowledge Management, Training ...).
Dans les conclusions de la matinée Presse organisée par
Celerant, Pascal Ansart reprend ces appréciations et en fait la
synthèse suivante : « Aujourd’hui on assiste à
une accélération du changement et les
consultants sont sollicité pour sa mise en œuvre et ce d’autant
qu’en 2005 on va manquer de ressources qualifiées (d’où
le nouveau contrat de travail proposé par le gouvernement).
Ainsi, l’effet Papy Boom va structurellement augmenter la demande
d’autant plus que les consultants savent travailler par projet.
Actuellement le marché se répartit entre 40% de Conseil
en Management et 60% de conseil en Systèmes d’Informations, le
plus souvent liés à la mise en place d’un produit. Or,
même si le conseil en Management est plus comportemental que le
conseil en SI, il est clair que les entreprises n’ont pas tant
des problèmes de stratégie, quand elle est bien
formulée, que des problèmes d’exécution à
85%. et l’étude montre qu’1/3 du conseil va se déplacer
de la stratégie vers la mise en oeuvre. Aussi notre rôle,
va être de donner à chacun les moyens et la confiance pour
mettre en œuvre cette stratégie. Ce qui pose un nouveau
défi. En effet, 50% de la stratégie fait appel à
des Etudes. Il ne s’agit donc pas des mêmes ressources. Le
déplacement du portefeuille entre Conceptual et Doers
crée une nouvelle difficulté ». Toutefois pour ceux
qui penseraient que la stratégie serait en voie de disparition
Pascal Ansart rappelle qu’aujourd’hui : « Les missions alibi
où le client se couvre derrière le client sont
moins fréquentes et les problèmes de
compétitivité de nos clients sont devenus globaux. Aussi,
l’intégration de cette contrainte doit-elle être faite par
les consultants » . Consultants on le voit qui auront à
affronter désormais les 3 défis identifier par Celerant :
l’engagement sur des résultats mesurables, la
nécessité d’un modèle international, et plus
subtilement, un équilibre Front End - Back Office. Des
consultants plus « Hands On », mais qui ne devront pas pour
autant oublier l’aspect stratégique car en cette belle
matinée du 23 janvier rue de Monceau l’aréopage de
journalistes s’accordait à reconnaître un danger à
cette évolution : « les entreprises finalement demandent
plus d’engagement opérationnel alors qu’elles ne savent plus
très bien où elles vont » ! Une raison
peut-être pour que l’on assiste, comme le faisait remarquer
Pascal Ansart : « à un retour vers leur
métier de base ».
Bertrand Villeret
Pour Info:
Etude Celerant Consulting /
TNS-Sofres (.pdf)
Présentation
de l'étude (.ppt)
www.celerant.fr