Techno
Avril  2011

дорога в космос
Daroga v'kosmos
Le chemin de l'espace



Je me suis avancé vers le président de la commission d’Etat et lui ai annoncé :

_ Pilote Lieutenant en chef Gagarine. Prêt pour le premier vol sur le vaisseau
   cosmique  « Vastok » (Восток),  « Orient ».!

_ Bon voyage ! je vous souhaite de réussir ! répondit-il, puis il me serra
   vigoureusement la main.

Je suis entré dans la cabine, on m’a assis dans le fauteuil et l’on a fermé le panneau sans bruit. Je suis resté seul en tête à tête avec les instruments de bord. J’entendais tout ce qui se passait à l’extérieur du vaisseau, sur cette Terre bien aimée qui m’est alors devenue encore plus  chère.

Mais voila que le silence se fit. J’annonçai :

_ « Ziemlia », zdiece « kosmonaft »,(Земля, здесь космонавт)
   « Terre » , Ici le « cosmonaute » .
  J’ai achevé le contrôle des communications. Tout était normal. L’état général
  était bon.
  Souda dliya atyezda (Ссуда для отъезда) Prêt pour le départ !

Le responsable technique du vol ordonna :

_ Padyom (Подьём) ! Décollage !

J'ai répondu :

_ Païyerali ! Vsio idiom normalno (Поехали ! Всё идём нормально)
   Allons-y ! Tout se passe normalement .

La montre indiquait 9 heures et 7 minutes, heure de Moscou. J’entendis un bruit qui augmentait progressivement et sentis que l’énorme vaisseau se mettait à vibrer et à s’élever lentement. La fusée commença à lutter contre la force d’attraction terrestre.

La pression augmentait. Je sentais que je ne pouvais bouger ni les bras ni les jambes. La pression augmentait toujours. Mais je savais que cet état ne continuerait pas longtemps. Quand le vaisseau serait sur orbite, la pression cesserait.

La « Terre » communiqua :

_ il s’est écoulé 70 secondes  depuis le lancement.

J'ai répondu :

_ Ya Panial Vass. « Ciemdiéciat » (Я понял вас. « Семьдесят »)
   Je vous ai compris : « 70 ».

Etat général excellent. Je continue le vol. La pression augmente.
Vsio idiom normalno (Всё идём нормально ) Tout va bien.

J’avais répondu cela mais pensé en moi-même :  « Est-ce possible qu’il y ait seulement 70 secondes » ? Des secondes longues comme des minutes.

La « Terre » demanda à nouveau :

_ Comment vous sentez-vous ?
_ L’Etat général est bon. Et pour vous ?

De la « Terre » , on me répondit :

_ Tout est normal.

En cet instant, le Vastok survolait un large fleuve sibérien.

_Quelle beauté ! m’écriais-je, mais je m’arrêtai aussitôt : mon devoir [était] de transmettre une information utile et non d’admirer la beauté de la nature. A ce moment là, la « Terre » m’a demandé de transmettre la communication qui devait suivre.

_ je vous reçois bien, répondis-je, l’état général est excellent ; Le vol se poursuit normalement. La pression augmente. Je vois le sol, la forêt, les nuages…

Dans les faits la pression augmentait sans cesse. Mais je m’habituais progressivement à elle et j’ai même pensé que, pendant l’entrainement, c’était bien plus pénible.

L’un après l’autre, le carburant épuisé, les étages de la fusée se sont détaché. Et voici que le vaisseau s’est mis sur orbite.  Je suis entré en apesanteur, cet état dont j’avais, encore enfant, lu la description dans les livres de Konstantin Tsiolkovski. Que m’arrivait-il en cet instant ?

Je n’étais plus assis dans le fauteuil, j’étais suspendu entre le plafond et le plancher de la cabine. Tout devenait  soudain plus léger. Les bras, les jambes et tout le corps me sont devenus comme totalement étrangers. Ils ne pesaient plus rien. On n’était ni assis, ni couché mais simplement suspendu dans la cabine. Aussi tous les objets [volaient]. Et le crayon, et le journal…

Pendant tout ce temps, j'ai travaillé : je surveillais les appareils du vaisseau, faisais des observations, prenais des notes dans le journal de bord. 

Oubliant un instant où je me trouvais, j’ai posé mon crayon à côté de moi et il m’échappa aussitôt. Je parlais à voix haute de tout ce que j’apercevais et un magnétophone enregistrait mes paroles en bande étroite.


La « Terre » était intéressée par ce que je voyais en bas. Et moi j’ai raconté que je voyais clairement les montagnes, les fleuves importants, les grandes  forêts et les côtes maritimes.

Le Vastok survolait les vastes étendues de la Patrie lorsque j'ai ressenti pour elles un chaleureux amour filial.

Extrait de дорога в космос, «  Le Chemin de l’Espace »,
Юрий Алексеевичi Гагарин, Youri Alexievitch Gagarine 



Images :
Source :  RIA Novosti 2011

Traduction :
B. Villeret



Copyright B. Villeret / Quantorg 2011
pour
ConsultingNewsLine
All rights reserved
Reproduction interdite



Youri Gagarine


Arkania