Le pOint
Sept-Oct 2006   
Acquisition de Plaut par CGI
Interview: Didier Moscatelli, Fondateur de Plaut France et Vice Président de CGI France
Suite au rapprochement entre la SSII canadienne CGI et l'ancienne filiale du groupe allemand Plaut, Didier Moscatelli, fondateur et Président de Plaut France, Vice Président Business & SAP Consulting de CGI France répond à nos questions

Monsieur Moscatelli, le cabinet parisien que vous avez fondé à l’enseigne du groupe allemand Plaut vient d’être repris par la SSII canadienne CGI, dont vous êtes Vice-Président. Peut-on passer en revue l’historique du cabinet puis passer sur le déroulé de cette reprise qui a surpris la place de Paris ?


Didier Moscatelli : J’ai créé Plaut France en 1998 en tant que filiale d’un grand groupe de conseil allemand plein d’avenir et présent à l’époque dans 7 pays avec 700 consultants. Nous avons poursuivi notre développement pour atteindre une taille de 2000 consultants et une présence dans 18 pays à la fin de l’an 2000. Mais cette forte progression ne s’est malheureusement pas poursuivie par la suite, du fait d’une croissance organique et externe mal maîtrisées Le Groupe a alors dû céder certains actifs à un concurrent puis certaines autres filiales (Australie, Espagne, Italie, Brésil) à leurs managers. J’ai mené ces MBO pour le compte du Groupe et ai tout naturellement proposé, fin 2004, de racheter la filiale française dont la santé financière et la dynamique n’avaient pas trop souffert au cours de la période 2001-2004 difficile pour notre profession.


Et l’on peut supposer qu’à partir de là les choses se sont accélérées

Didier Moscatelli : Mathieu Godard, à l’époque DG de Plaut France, et moi-même avons cherché plusieurs solutions de LMBO et de MBO. Nous avons finalement retenu Galileo, Société de Capital Risque et de Développement reconnue comme un acteur performant dans le domaine des Technologies de l’Information, qui a pris 49% des actions, nous-mêmes conservant les autres 51%. L’acquisition s’est faite en mai 2005 avec l’objectif de croître sur les marchés du consulting et de SAP qui retrouvaient leur croissance des bonnes années pour envisager une revente dans un horizon de 4-5 ans, ce qui est classique avec un fonds d’investissement. En 2005, nous avons réalisé un chiffre d’affaires de 13,3 millions, ce qui représente une croissance de 15% par rapport à 2004 et nous visions une croissance moyenne de 11% par an jusqu’en 2009 - 2010. A la fin du premier trimestre 2006, Galileo nous a fait part de son intention de céder plus tôt que prévu sa participation afin de réaliser leur plus value, Mathieu Godard et moi-même n’ayant pas les moyens de racheter, car déjà fortement endettés pour le MBO, nous avons conjointement décidé de recourir aux services d’une banque d’affaires spécialisée en fusion&acquisitions. Notre choix s’est porté sur la banque Bryan Garnier, ayant une compétence reconnue dans le secteur des Technologies de l’Information, avec qui nous avons choisi de rechercher deux types d’acquéreurs : d’un côté des grandes sociétés de services informatiques étrangères (USA, Inde, Canada, UK) qui nous apporteraient un réseau international et de fortes opportunités de synergies ; de l’autre des fonds d’investissement pour mener un LBO secondaire et développer une stratégie offensive de croissance par acquisitions.  Nous avions délibérément exclu nos concurrents français afin de préserver notre identité et notre culture de la proximité clients et consultants.


Quelles ont été les raisons du choix de CGI ?

Didier Moscatelli : Dès nos premiers contacts avec les équipes de CGI, nous avons été séduits par la culture de ce groupe, son attachement aux collaborateurs (qu’ils nomment d’ailleurs des membres) et son sens de l’efficacité. Nous les connaissions aussi pour avoir travaillé ensemble au niveau européen quand nous étions au sein du Groupe Plaut. Enfin, nous avons été très surpris par la mobilisation et le professionnalisme des équipes lors de la phase de due diligence.


La proximité semble être votre marque de fabrique mais peut-on être encore proche du client quand on a plus de cent consultants ?

Didier Moscatelli : Nous sommes aujourd’hui près de 120 consultants et nous avons su préserver une relation de grande proximité avec nos client Grands Comptes. Cela se traduit, du Consultant au Directeur, par une forte capacité de réaction et de décision rapides, une attitude constructive commune dans les moments délicats auxquels nous devons faire face dans la vie normale des projets et surtout le respect des engagements donnés, même verbaux. 


Donc une situation satisfaisante. Pour autant le mécanisme est un peu contradictoire. On commence par un MBO pour prendre une certaine autonomie puis on est racheté par une SSII (mécanisme inverse de celui de la séparation d’A.T. Kearney d’avec EDS).

Didier Moscatelli : La situation est différente car pour A.T. Kearney, il y avait 2700 personnes qui avaient été intégrés il y a plusieurs années. Le choix des Partners a été de quitter la structure car le business model d’EDS ne les satisfaisait pas mais surtout, ne leur apportait pas la complémentarité qu’ils attendaient.  Dans notre cas c’est différent. Nous faisions initialement partie d’un groupe d’Europe continentale dont les ambitions et les moyens financiers se sont amenuisés après 2001. Nous avons donc cherché à protéger nos actifs français et en quittant le Groupe Plaut, nous nous sommes vite aperçus que notre taille et notre présence limitées à la France étaient devenues un handicap pour répondre aux besoins de globalisation et d’intégrateur unique de nos grands clients.  < style="color: rgb(0, 0, 0);">De plus notre expérience sectorielle étant surtout  dans les secteurs Manufacturier et des Services non Financiers, un pan entier de notre marché, les Services Financiers, nous échappait faute de référence et d’expertise. Ce constat étant fait, nous avons décidé que malgré nos 15% de croissance annuels, devenir plus grand pour prétendre être un acteur global pour nos clients devenait très difficiles par la seule croissance organique. Nous nous sommes alors intéressés à la croissance externe et avons étudié plusieurs sociétés de taille moyenne mais nous nous sommes rapidement aperçus que nos moyens financiers ne nous le permettaient pas. La décision de rejoindre un grand groupe international peu présent en France et sur le marché SAP a donc été naturelle, CGI s’imposant rapidement comme le meilleur choix.


Donc le choix à un moment se fait pour CGI. Peut-on déjà noter de premiers effets ?

Didier Moscatelli : A ce jour, six mois à peine après le rapprochement, nous sommes ravis. La réaction de l’ensemble de nos clients a été très positive, certains y voyant une réelle opportunité d’effet de levier à l’international ou pour des prestations de services informatiques complémentaires. Pour nos consultants et notre équipe de support administratif, l’intégration s’est rapidement et bien passée. Nous avons déménagé 2 mois après en passant de la rive gauche à la rive droite, nous avons su conserver la plus grande partie notre mode de fonctionnement et avons su travailler intelligemment avec les équipes de CGI France pour bâtir des plans communs de formation et de partage d’expérience. Nous sommes même surpris de la vitesse d’intégration, mais il faut reconnaître que c’est un grand savoir-faire de CGI qui au niveau mondial a su intégrer avec succès près de 65 sociétés en 10 ans.


Pour l’instant vous arborez toujours l’enseigne Plaut

Didier Moscatelli : Depuis le 1er octobre, nous avons abandonné l’enseigne Plaut au profit d’une communication unique sur la marque et le logo CGI. Ce serait malhonnête de dire que cela a été facile car aussi bien en interne qu’en externe, la marque Plaut véhiculait des valeurs fortes et reconnues dont nous étions tous très fiers. Ceci étant, nous focalisons aujourd’hui nos efforts de promotion sur la marque CGI qui, alors qu’elle est très forte en Amérique du Nord, semble souffrir d’un manque de notoriété en France. Nous sommes d’ailleurs souvent confrontés à un amalgame avec une grande SSII française de même nom des années 80 et 90 qui avait été vendue en 1994 à IBM, mais qui n’a absolument rien à voir avec le groupe d’origine canadienne que nous avons rejoint. Notre ambition désormais est d’accroître la notoriété spontanée de CGI en France au même niveau qu’au Canada.


Donc rachat de Plaut France par CGI. De là, serez-vous amenés à développer plus le conseil ou plus les services informatiques ?

Didier Moscatelli : Nous allons maintenir et renforcer notre offre en Conseil et en intégration SAP. Notre division au sein de CGI France s’appelant d’ailleurs Business et SAP Consulting Services. Cela nous sera d’autant plus facile que nous avons trouvé au sein des autres divisions de CGI France un réel savoir-faire en matière de conseil et d’assistance à la maîtrise d’ouvrage, principalement dans les secteurs Banques, Marchés de Capitaux et Utilities. Le développement des Services Informatiques (intégration de systèmes, TMA, BPO, …), prévu en France, y compris par acquisitions, se fera surtout dans les autres divisions.


Et pour ce qui est de votre positionnement à l’international ?

Didier Moscatelli :
A deux égards, l’envergure internationale du groupe est un avantage indéniable : pour nos clients d’une part et pour l’ensemble des collaborateurs. En terme de mobilité géographique, nos jeunes collaborateurs recherchent de plus en plus des missions sur le continent nord- américain ou en Europe. Il nous est très simple désormais de répondre à leurs attentes, soit en les affectant sur une mission de longue durée, soit en les aidant à être muté dans une autre entité à l’étranger. Nous sommes à ce propos entrain de mener trois cas en parallèle. Pour nos clients, nous serons en mesure de leur apporter une gamme de services et d’offres ainsi qu’une mobilisation géographique importante pour les projets internationaux. Plusieurs d’entre eux nous ont déjà offert l’opportunité de répondre à des appels d’offre internationaux.


On imagine que vous souhaitez croître et que CGI souhaite un ROI sur cet investissement. Quels objectifs seraient déjà déclarés des 2 côtés ?

Didier Moscatelli :
Jacques Leray, le Directeur Général France, a de nombreuses fois communiqué sur l’ambition de CGI de tripler sa taille en Europe d’ici 2010. Cela se fera par croissance organique et par acquisitions. En ce qui concerne notre division nous souhaitons poursuivre notre développement avec une croissance supérieure à notre marché, comme nous l’avons fait depuis notre création en 1998. Nous étudions aussi régulièrement des opportunités d’achat.


Et pour ce qui est purement Conseil ?

Didier Moscatelli : Seul le Conseil Opérationnel, aboutissant à des résultats visibles et tangibles, nous intéresse. Avant le rapprochement avec CGI; nous réalisions près de 15% de notre chiffre d’affaires dans ce domaine. Nous visons plutôt 20% aujourd’hui grâce aux synergies inter-divisions au sein  de la France mais surtout en travaillant plus étroitement avec nos collègues d’Amérique du Nord dont le savoir-faire est réel et exportable.

Propos recueillis par Bertrand Villeret
Rédacteur en chef de ConsultingNewsLine


Pour info :
http://www.cgi.com

Whoswoo : 
Didier Moscatelli

Images :
Courtoisie CGI / Trimedia. 2006



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