Cabinet
27 sept 2005  
Dossier spécial:  Changements climatiques
La contrainte Carbone
Dans le cadre de la mise en place du marché européen d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre, Le cabinet Deloitte a réalisé une analyse multi-sectorielle de la performance financière des entreprises en  regard de leurs émissions de carbone. Cette étude qui a concerné 88 entreprises met en évidence une très grande variabilité de la  sensibilités des entreprises à l'égard de la contrainte carbone  entre secteurs d’activité comme au sein d’un même secteur
SN
Sylvie Noger, Deloitte


On le sait, les sociétés de conseil, et principalement les société d’audit, ont depuis 10 ans investit massivement le secteur de l’environnement et du développement durable, ainsi que plus  récemment dans celui de la responsabilité sociale. La raison en est que les pratiques de bonne gestion de ces domaines font largement appel à la transparence, ce qui se traduit notamment par l'apparition d’audits, par du reporting et de la certification de rapports, 3 activités que les sociétés d’audit maîtrisent de longue date dans le domaine financier. Et dans le cadre particulier de l’environnement,  la contrainte sur le changement climatique liée à l’effet de serre a fait apparaître la notion nouvelle d’autorisations d’émissions de Gaz à Effet de Serre (GES),  échangeables sur des marchés, mécanisme qui est  de nature à renforcer la position stratégique des cabinets d’audit en raison de son aspect purement financier. Toutefois ce mécanisme nouveau qui pour l’Europe fait appel à des quotas ne fait que de se mettre en place en 2005 et nombre d’inconnues subsistent encore sur son bon fonctionnement. C’est une des raisons qui ont motivé Deloitte à mettre en place une étude portant sur 88 entreprises représentant 15 secteurs, et dont 54 appartenaient aux entreprises cotées au CAC 40, SBF 120 et SBF 250. Cette étude a été menée par Sylvie Noger, en charge de la ligne Environnement et Développement Durable de la practice Enterprise Risk Services (ERS) de Deloitte ainsi que Fédéric Moulin, Associé de Deloitte et Responsable d’ERS chez Deloitte.


Le marché
Pour bien comprendre les enjeux de l’Etude menée par Deloitte il est nécessaire de rappeler le contexte dans lequel s’inscrit la mise en place de la limitation des émissions . Ainsi rappelons pour mémoire que Kyoto a été au départ ratifié par 55 pays comptant pour 55% des émissions de gaz à effet de serre libérés sur l’ensemble de la planète. Comme on le sait, l’ensemble des grands pays industrialisés ont ratifié ce traité à l’exception des USA et de l’Australie, cette dernière prévoyant un contrôle intérieur. Les engagements à réduire les émissions ont ainsi fait l’objet pour les Européen d’une Directive que les pays membres de l’Union se sont engagés à traduire dans leurs législation locale. Dans le cadre de ce mécanisme les pays de l’Union ont défini des listes d’entreprises et leurs ont affecté des quotas d’émission, portés à leur crédit. L’objectif dans une phase de test qui va durer 3 ans est donc aujourd’hui pour les entreprises visées de tenter de se placer sous les quotas fixés et de «revendre» à ceux qui ne peuvent s’y soumettre pleinement leurs excès de quota.  Ainsi  par ce mécanisme les entreprises sous-performantes doivent pouvoir acheter leur absolution auprès des entreprises plus vertueuses.


L'Etudes de Deloitte
C’est donc dans ce cadre qu' a été menée  l'étude de Sylvie Noguerre (Enterprise Risk) et Frédéric Moulin (ERS) Cette étude est mise à la disposition des lecteurs de ConsultingNewsLine: Contrainte Carbone.

Elle repose essentiellement sur l'emploi du ratio suivant:
eq CO2 (Tonnes d’équivalent carbone) / EBIDA (en KEuros)soit donc un ration représentant sensiblement le rapport des "émissions directes de gaz à effet de serre" sur " valeur dégagée en milliers d’Euros"., sachant que l' EBIDA traduit les Earnings Before Interest Taxes, Depreciation and Amortization. Anisi il apparaît la varialbilité suivanted'un secteur à l'autre:

Construction & matériaux :                   17,63 Teq CO2 / KEuros
Utilités (branche énergie)                      11,05
Extraction & matières premières           10,71
Transports aérien et loisirs                    7,48
Chimie                                                5,34
Pétrole & gaz                                       3,15



L'analyse  détaillée met en évidence des disparités importantes
par secteur et par entreprise au sein d'un même secteur :

  - La moyenne des secteurs se situe entre 0,06 et 17,63 teq CO2 / k€

  - Les ratios des entreprises pris individuellement se situent entre 0,01
     et 75 teq CO2 / k€.


Si l'étude  permet  de  reconnaître  la  pertinence  du  ratio «émissionsdirectes de GES (teq CO2)/EBITDA (k€) » comme indicateur de l'exposition aurisque  carbone des entreprises, elle met également en évidence ses limites d'interprétation  du  fait  du  niveau limité de fiabilité de l'informationpubliée  par  les  entreprises sur les émissions de gaz à effet de serre de leurs activités.

En effet, l'information publiée par les entreprises est souvent incomplète, en  particulier  pour  certains  secteurs  (biens  &  services industriels, transport routier,  banque  &  assurance, media). Elle manque également de clarté, notamment  sur  les  référentiels  de  calcul  employés  et sur le périmètre couvert  par  les  données  publiées.  La  qualité d'information actuelle permet  de  dégager des tendances sectorielles du ratio teq CO2 / EBITDA, mais n'est pas suffisamment consistante à ce jour pour comparer les performances individuelles des entreprises d'un même secteur.

A  mesure  que  le  reporting  des  émissions  de  gaz à effet de serre desentreprises se structure et que sa fiabilité s'améliore, le ratio « teq CO2 /  EBITDA  »  devrait  permettre  aux  actionnaires et analystes financiersd'analyser  de  façon détaillée la sensibilité des performances financières au regard de l'internalisation des coûts du carbone.

Il  appartient  désormais aux entreprises d'intégrer au mieux les enjeux de la  contrainte  carbone  à leur stratégie en surveillant, sur l'ensemble du périmètre  consolidé,  les  émissions  de  gaz  à  effet  de serre de leursactivités, en pilotant l'éco-efficacité des procédés et des investissements en vue de diminuer le ratio « teq CO2 / EBITDA » et enfin en présentant une information claire et vérifiée par un tiers indépendant.


Bertrand Villeret
Rédacteur en chef, ConsultingNewsline
selon Etdue, interview et txte transmis par Eric Chauvelot, Rumeur Publique



Pour info :
www.deloitte.fr



Historique :


1827  
France 
Description scientifique de l’effet de serre par Jean Baptiste Fourrier (1786 - 1830),  Physicien français et Préfet de l’Isère, auteur des équations décrivant  la diffusion de la chaleur et inventeur de l’opération mathématique dite  "Transformée de Fourrier". La description de l’effet de serre apparaît dans ses "Remarques générales sur les températures du globe terrestre et des espaces planétaires".
1861  

Standardisation des observations météorologiques (L'organisme qui se met en place deviendra l’OMM)
1895 
Suède 
Théorie de la "Sphère chaude" proposée par le Chimiste suédois Svante Arrhenius (1859-1927) pour expliquer les variations des climats. Il propose le CO2 comme agent principal de réchauffement de l’atmosphère.
1957   
Hawaï +
 Alaska.
Systématisation des mesures de CO2 dans l’atmosphère  par Charles Keeling 
1967
Première prévisions faisant état d’un doublement du CO2 atmosphérique pour le fin du siècle pouvant contribuer à une élévation de 2,5° de la température atmosphérique
1972 
Stockholm
Première mention à la Conférence Mondiale sur l’Environnement d’un réchauffementpossible de l’atmosphère en raison de l’activité anthropique
1979 Genève Première Conférence Mondiale sur les Climats (OMM).
Lancement du programme mondial sur les climats  par l’OMM, la PNUE et l’ICSU
1985 
Villach
Conférence sur l’évolution et le rôle du CO2 et des autres Gaz à Effet de Serre (GEF) dans les variations climatiques (PNUE-OMM). Apparition d’un consensus scientifique sur la réalité d’un réchauffement de la planète indépendant des cycles séculaires
1986

Conception du programme Global Change (pour la géosphère et la biosphère)
1987 Montréal Signature d’un accord par 27 Etats

Bellagio 
Conférence sur les mesures à prendre face au réchauffement  climatique


Publication du Rapport de la Commission de l'Environnement et du Développement de l'ONU dit Rapport "Bruntland" intitulé «Our Common Future» faisant apparaître le terme Sustainable Development
1988
USA Climate Change Act voté par le Congrès des Etats Unis prévoyant des propositions avant fin 1989

Toronto  
Juin. Conférence (juin)recommandant une réduction des émissions globales de CO2  de  20% des pays industrialisés à l’horizon 2005.


Lancement par le PNUE et l’OMM du GIEC Groupe Inter-gouvernemental sur l’Evolution des Climats (IPCC)
1989
La Haye Mars. Deuxième Conférence Mondiale sur les Climats (OMM). Adoption par 27 Etats du principe de création d’une Haute Autorité Mondiale de l’Atmosphère.


Proposition par la Communauté Européenne d’une stabilisation des émission de CO2 en l’an 2000
sur la base de la production de 1990.


Mai. Conseil d’Administration du PNUE donnant mandat à l’OMM de préparer une Convention.


Juillet. Sommet du G7 recommandant la signature d’une Convention sur le climat.

Belegrade
Septembre. Expression par 77 pays non alignés (en développement) sur les problèmes globaux.

Noordwijk
Novembre. Conférence Internationale


Décembre. Résolution de l’Assemblée générale de l’ONU sur la protection du climat  prévoyant l’organisation d’une conférence à Rio de Janeiro en 1992
1990
USA
Juin. Global Warming Act rejeté par le Congrès américain

Bruxelles 
Octobre. Accord de tous les membres de la Communauté Européenne  pour la stabilisation des émission de CO2 en l’an 2000 sur la base de la production de 1990.

Genève
Novembre. Conférence Mondiale sur le Climat. Adoption des recommandations du GIEC et mise en place d’un Comité Intergouvernemental de Négociation (CIN) pour la réalisation d’une convention cadre (Présidence Jean Ripert). Premier Rapport du GIEC mentionnant : «la cohérence entre le réchauffement observé et les prévisions des modèles mais rappelant que ces évolutions restent compatibles avec la variabilité des climats»
1991 Washington Février. Première session du CIN
1992 
Rio de Janeiro Juin. Conférence mondiale sur l’Environnement et le Développement (CNUED) dit «Sommet de la Terre». Signature de la Convention sur les Climats UNFCCC engageant à réduire les GES et à les ramener à ceux de 1990 en l’an 2000.
1995
Deuxième rapport du GIEC qui fait mention d’un réchauffement moyen de 1 à 3,5° en 2100 concourrant à une élévation du niveau des mers de 15 cm à 1 mètre
1996

Loi Lepage sur l’Air en France et première publication officielle du référentioel international ISO 14 001
1997 Kyoto 11 Décembre. Signature du  «Protocole dit de Kyoto» par 55 pays représentant 55% des émissions de gaz à effet de serre (barème 1990) et qui fixe un objectif de réduction de 5,2% des émissions de GES entre  2008 et 2012 par rapport au niveau de 1990.
1999

A cette date 89 pays ont déjà signé le Protocole
2000 

L’OMM déclare le XXème siècle le siècle le plus chaud du millénaire et la décénnie1990-2000 comme la plus chaude depuis 1860
2001  

Le Rapport du GIEC  la moyenne de la température du globe aurait augmenté de 0,6 0 depuis 1861 soit 0,15° de plus que la prévision de 1995. Le niveau des mers se serait ainsi élevé de 10 à 20 cm depuis le début du siècle.
2003

Apparition de l’Investing in Responsible Business


Octobre. Directive Européenne 2003/87/CE du 13/10/2003 établissant un Système d’Echange de Quotas d’Emissions (SEQE) de Gaz à Effet de Serre (GES) dans l’Union Européenne à partir du 1er Janvier 2005
2004

Transposition de la Directive Européenne en droit Français:


Avril. Ordonnance 2004-330 du 15/04/2004


Août. Décret 2004-832 du 19/08/2004 portant «Création d’un système d’échange de quotas d’émissions de gaz à effet de serre»           
2005

Janvier. Lancement du SEQE (Système d’Echange de Quotas d’Emissions de Gaz à Effet de Serre )           


Février. Entrée en vigueur du Protocole de Kyoto


Arrêté du 25/02/2005 fixant « la liste des exploitants auxquels sont affectés des quotas et le montant des quotas (PNAQ) : 6 secteurs d’activité, 1128 installations désignées pour 3 ans    


Juin. Arrêté du 14/06/2005 fixant les modalités d’agrément des «Vérificateurs».


Juillet. Arrêté du 28/07/2005 relatif à la vérification et à la quantification des émissions.


Novembre. 157 pays ont a ce jour signé le protocole de Kyoto

Montréal
Novembre.
Accord du 10 décembre assurant le prolongement du protocole de Kyoto au delà de 2012
                 

Remarques :

ne pas confondre :

Protocole de Montréal (1987) sur la limitation des gaz à effet sur le couche d’ozone ratifié par 85 pays.
Convention de Rio sur la Bio diversité
Convention CITES, Convention sur le Commerce Internationale des Espèces de Faune et de Flore sauvage
(Convention on International Trade of Endangered Species)


Glossaire :

CIN Comité Intergouvernemental de Négociation
CNUED Conférence des Nations Unies sur l’Environnement et le Développement
GES 
Gaz à Effet de Serre
GIEC
Groupe Intergouvernemental  d’Evolution des Climats (cf. IPCC)
IPCC 
International Panel on Global Change (cf. GIEC)
ICSU International Council for Scientific Unions
OMM 
Organisation Météorologique Mondiale
PNUE 
Programme des Nations Unies pour l’Environnement
SEQE Système d’Echange de Quotas d’Emissions de Gaz à Effet de Serre
  UNFCC
United Nation Framework Convention on Climate Change





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CC
Frédéric Moulin, Deloitte


































































































































































































































































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