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Sept 2007


Report on the FEACO meeting in Budapest
Interview : Antoine Beuve-Méry
President FEACO, Brussels
(European Federation of Consulting Firms Associations)



Monsieur le Président, le dernier congrès de la FEACO a réuni plus de 200 consultants, principalement européens ainsi que les représentants de délégations étrangères, on pense notamment au Japon, à la Chine, à l’Inde ou encore aux USA. Peut-on après ces quelques mois écoulés faire l'évaluation de ce congrès en terme de données économiques, de marché du conseil, d’évolution de cette profession?

Antoine Beuve-Méry : D’emblée je dirai que ce congrès nous a permis de constater et de confirmer la reprise d’activité des cabinets de conseil depuis 2 ans maintenant. Pratiquement tous les pays européens affichent de fortes croissances de leur activité conseil.


On pense notamment à l’Allemagne qui devient le premier marché du conseil en Europe, selon les chiffres que vous aviez publié pour 2006.

Antoine Beuve-Méry : En effet, il y a quelques surprises, même si l’évolution des modes de calcul peut avoir introduit un biais. D’une part l’Allemagne qui devient le leader mais aussi l’émergence des pays de l’Europe de l’Est. Pour l’Allemagne deux raisons. D’abord une reprise de l’économie allemande ensuite un effet de taille : c’est le plus grand marché d’Europe et en plus, force est de constater que les allemands se sont mis à utiliser le conseil de façon plus naturelle, d’où cet effet de volume. Cela dit le Royaume Uni reste “ Le ” pays du conseil et le plus dynamique. Il faut voir que beaucoup de sujets qui intéressent l’Europe sont traités en Angleterre, le marché des “ Utilités ” par exemple, l’évolution des problèmes réglementaires etc... et là, les compétences se trouvent sur la place de Londres, d’où ce résultat impressionnant : 1% du PIB du Royaume Uni est généré par les cabinets conseil. La proportion est plus faible en Allemagne ou en France.


Une France qui semble maintenant talonnée par l’Espagne. Qu’en est-il?

Antoine Beuve-Méry : Là il faut faire un examen précis des chiffres et voir si l’on parle des ventes totales de conseil, ou de la ventilation entre Business Consulting et Management Consulting. En Espagne il y a une seule association qui représente le conseil. En  France il y a en a deux : Syntec Conseil en Management et Syntec Informatique, ce qui laisse la porte ouverte à divers modes de calcul. Si on additionne le conseil en informatique et le conseil en Management la France serait loin devant. Cela dit, il ne faudrait pas oublier que l’Espagne est très dynamique. L’évolution de l’économie espagnole de +3,5%, là où la France ne fait que 2%, explique sur le long terme le développement de l’activité conseil espagnole.


On constate toutefois un réel dynamisme du conseil espagnol lequel commence à apparaître sur les réponses aux appels d’offres européens par exemple. Réalité ou simple impression?

Antoine Beuve-Méry : Comme toutes les économies du Sud, l’Espagne se développe rapidement et avance sur le chemin de la “ propension à consommer du conseil ”. Le boom économique espagnol y a contribué, cela ne fait aucun doute, notamment au travers des “ Centres de Services ” qui s’y sont installés, comme à Barcelone. Il n’y en avait pratiquement pas il y a 5  ans. (4 à 5 ans je m’imagine ?)


Le congrès de 2006 se tenait à l’Est, dans la suite des congrès de Ljubljana (2003) et Athènes (2004). Il se devait donc d’aborder le développement des anciens pays de l’Est, ceux que l’on appelle maintenant l’Europe centrale, et qui semble tout à fait remarquable. Que peut-on en dire?

Antoine Beuve-Méry : Pour voir les choses globalement il y a un facteur d’accélération du conseil en Europe et surtout en Europe de l'Est parce que la croissance y est forte. Mais il s’agit là d’un rattrapage. Ils ont à rattraper leur retard et le chemin à parcourir reste important pour que ces pays s’alignent sur les économies d’Europe de l’Ouest : donc malgré la forte croissance ils sont encore à des niveaux d'activité faibles. Leur marché est en démarrage et par conséquent nécessite de grands changements. Or les consultants vivent du changement donc le conseil prospère à l’Est. Et comme ils font tout à marche accélérée cela génère du "besoin en conseil" très important. Maintenant, il est difficile de tirer trop de conclusions sur la base des croissances du conseil car quand tout va mal on doit dépenser en conseil et quand tout va bien on peut dépenser en conseil, aussi le conseil en général va bien.


Donc un conseil qui prospère à l'Est. Qu'en est-il de la Hongrie, dont la fédération VTMSZ co-organisait le congrès de Budapest ? Ce pays a-t-il été perçu comme une opportunité pour les consultants français?

Antoine Beuve-Méry : En effet. La Hongrie qui organisait le congrès, a semble-t-il intéressé les congressistes et notamment les français. Elle reste un marché un peu fermé en raison de sa langue très difficile [le magyar] et ce d’autant que les marchés publics nécessitent une bonne maîtrise des  langues. Et comme pour des raisons historiques l’allemand est parlé en Hongrie plus que le français, cela rend ce pays difficile d’accès pour les consultants francophones qui se demandent s’ils doivent y installer ou non une représentation. A cette question la réponse peut être assurément oui, mais cela dépend de l’activité et du volume.  Malgré le dynamisme hongrois un calcul montre que la Pologne reste et de loin le lieu privilégié des investissements étrangers de par le volume de son économie. A titre d’exemple c’est 30% des aides communautaires européennes qui vont à la Pologne. Aussi, toutes proportions gardées la Hongrie a un niveau plus comparable à celui d’un pays comme la Belgique, sans pour autant présenter d’industries phare comme dans le reste de l’Europe (en Belgique vous avez Solvay, en Finlande vous avez Nokia, en Hollande Philips, en République tchèque Skoda etc... ). Donc cela reste un pays important pour les consultants de l’Ouest qui y viennent lorsque leurs clients s’y installent, mais difficile.


Un peu comme la Grèce ?

Antoine Beuve-Méry : Certainement, même si là aussi je me garderai de comparaisons ou de conclusions hâtives.  [Les cabinets grecs exportent leur conseil dans les Balkans, dans le pourtour méditerranéen, maîtrisent bien l’anglais et sont représentés à Bruxelles].


La Roumanie et  la Bulgarie entrent dans l’Union Européenne en 2007. Pour la Roumanie il existe une tradition francophone, voire francophile et l’on reste étonné par la qualité du français parlé par les consultants roumains qui pour beaucoup n’ont jamais séjourné longuement en France, d'où certainement une forme d'opportunité pour les consultants français.  Que peut-on dire de l'entrée de ces deux pays dans l'union?

Antoine Beuve-Méry : Roumanie et Bulgarie intègrent en effet l’union en 2007 et donc sont éligibles au titre des objectifs 1-2-3 des programmes communautaires alors que jusqu’ici il ne bénéficiaient que des aides aux pays tiers sur les programmes de type Phare. Ils vont donc avoir accès à l’aide au développement intra communautaire ce qui devrait leur apporter un fort développement comme celui observé en Grèce et au Portugal. Nous le leur souhaitons.


Question cette fois-ci étendue à l'ensemble de l'Europe : peut-on lier la forte croissance du conseil que l'on observe actuellement au développement de l’innovation dans les entreprises?

Antoine Beuve-Méry : Absolument. A titre d’exemple le CEO survey réalisé par IBM en 2006 , place l’innovation comme préoccupation première. Il ne s’agit pas seulement l’innovation technologique, mais aussi la façon d’accomplir en pratique les métiers, d’ouvrir les processus internes vers l’extérieur. Ceci explique la vague de l’e-Business qui relaie celle  des grands systèmes ERP. La première vague,  est apparue au milieu des années 90, et a culminé en l’an 2000, lorsque les entreprises ont fait le choix d’abandonner leurs vieux systèmes d’information (Legacy) pour des solution ERP qui leur permettait de passer le Bug de l’an 2000 et d’intégrer l’Euro. La vague de l’e-Business est d’une autre nature. Il s’agit de supporter de nouveaux modes de travail, qui supposent des changements important tant au  niveau des processus qu’à celui des systèmes d’information qui les supportent.. Avant de s’ouvrir “ électroniquement ” vers ses clients ou ses fournisseurs, il faut avoir mis de l’ordre dans sa propre maison. L’ouverture que permettent le web et l’e-Business est riche de nombreux potentiels mais est aussi. une fenêtre sur l’intérieur de l’entreprise. Gartner et IDC dans leurs rapports indiquent que les architectures systèmes sont essentielles pour la mise en œuvre de systèmes commerciaux en ligne. C’est une des raisons pour lesquelles on peut s’attendre à une demande de conseil.


Est-ce à dire qu’on ne verra plus de grands développements logiciels comme par le passé mais plutôt de la mise en place de produits paramètrables qui ne nécessitent ni développent ni conseil ? Je pense en disant cela aux chiffres de la FEACO qui répartissent les ventes entre ~ 50% conseil en management, 30% Outsourcing et seulement 19% pour le conseil en intégration de systèmes

Antoine Beuve-Méry : En effet. Mais l’intégration de système n’est pas morte pour autant. On ne va pas reléguer l’intégration au rang des accessoires inutiles. Il y a encore des projets dans ce domaine et il y aura de grands chantiers d’autant que les ensembles deviennent de plus en plus hétérogènes, et d’une grande complexité. Aussi clairement je peux vous dire que l’intégration de systèmes a un bel avenir.


On voit de plus en plus d’offres de BPO (Business Process Outsourcing). Est-ce une simple impression ou un phénomène bien réel ?

Antoine Beuve-Méry : Il s’agit là d’un phénomène bien réel qui comprend parfois un réel élément d’innovation, dans la mesure où il ne s’agit plus d’outsourcer des activités périphériques à l’entreprise (gestion des RH, paie, informatique...) mais tout ou partie de ce que certains considèrent comme faisant partie du “ cœur de métier ”.


De l'Outsourcing on passe à l’Offshoring complet de certaines activités. A Budapest les délégations étrangères étaient nombreuses,  notamment pour l ’Asie avec Hong Kong, l’Inde et le Japon dont la délégation était importante. Que peut-on en dire?

Antoine Beuve-Méry : Il faut savoir que les japonais sont toujours très nombreux, c’est une tradition. Ils viennent en nombre. Et bien sûr nous avons de nouveaux participants : Inde et la Chine. (Faut éliminer la question, comme il n’y a pas de réponse)


Un congrès donc très international, avec bien sûr de nombreux consultants des Päys de l'ESt mais aussi de l'Asie avec notamment de nombreux japonais, des Chinopis de Hong Kong, des Indiens. Peut-on faire après ces quelques mois écoulés un premier bilan du congrès en terme d'organisation?

Antoine Beuve-Méry : On a eu beaucoup plus de monde que d’habitude. J’ai trouvé que c’était un événement de très “ Haute volée ”  que la Hongrie a fort bien organisé. Une chose nouvelle a été l’événement de Networking des participants que nous avons mis en place et qui a permis de gérer des rendez-vous individualisés entre consultants, ce qui a eu un grand succès et a été très apprécié. Le but était que les consultants des divers pays et de diverses tailles puissent se rencontrer et former des réseaux. Une bonne quarantaine de personnes sur les 200 congressistes a participé à cette session. Donc pour une première c’est pas mal et nous avons un bon Feed Back. Donc satisfaction. 


Pour conclure cette interview Monsieur le Président peut-on savoir, si vous deviez ne retenir qu’un seul élément, quel serait-il?

Antoine Beuve-Méry : Je dirai qu’aujourd’hui il n’y a plus de Léonard de Vinci ou de Pic de la Mirandole. Un homme seul ne peut plus être bon dans tous les domaines et tout maîtriser. Chacun et chaque entreprise n’est fort que dans son domaine et pour le reste doit savoir faire appel à l’extérieur et être aidé. Et c’est là que les consultants interviennent. S’ils n’étaient que “celui qui vous dit l’heure en regardant votre propre montre” cela fait longtemps qu’ils auraient disparu. Il sont des agents d’aide au changement et lorsque l’on voit l’énorme besoin de changement en Europe et la forte demande, il est clair qu’il y a place pour des consultants de qualité d’autant que l’industrie du conseil a un rôle à jouer dans le cadre de la mise en place de l’agenda de Lisbonne. Je vous donne donc rendez-vous au Congrès de Varsovie qui aura lieu en octobre 2007. 


Words collected by Bertrand Villeret
Editor in chief, ConsultingNewsLine



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