Colloque
Sept-Oct 2005  
Dossier spécial:  Intelligence Economique
Investissements étrangers et
Sécurité nationale
Résumé des débats
Le colloque organisé par le député Bernard Carayon à l'Assemblée nationale était l'occasion de confronter les points de vue et les pratiques US et Français. Le moment aussi aux politiques d'indiquer poliement que la France entend bien ne pas se laisser piéger au jeu du double langage, et ce d'autant qu'avec l'Europe jamais les frontières n'ont été aussi ouvertes. Après l'Intelligence économique voici donc le Patriotisme économique...

Le 10 Octobre 2005, L’Assemblée Nationale était l’hôte d’un colloque intitulé «Investissements Etrangers et Sécurité Nationale». Placé sous le haut patronage de Jean-Louis Drebré et Présidé par le Député Bernard Carayon, ce colloque, ouvert par Michèle Alliot-Marie, Ministre de la Défense et clôt par Craig Stapleton, Ambassadeur des USA en France,  devait rassembler quelques centaines de personnes concernées par le sujet ainsi qu’une trentaine d’orateurs représentant les pouvoirs publics, les grandes entreprises, les cabinets conseil et une importante délégation américaine. Interviewé sur son initiative le Député Carayon confiait à notre confrère l’Hémicycle : «ce colloque s’inscrit dans le cadre que j’ai engagé depuis 3 ans sur les questions de sécurité et de compétitivité économique affectant les entreprises françaises et européennes. Ces problématiques s’inscrivent dans les contentieux commerciaux mondiaux dont nous sommes les témoins et bien sûr les victimes impuissantes. En ce sens l’analyse des dispositions mises en place par les Etats-Unis pour protéger leurs entreprises, anciennes, efficaces, rarement dissimulées mais peu connues des Français, m’apparaissait justifier une comparaison avec les dispositions françaises. Ce colloque répond donc à un souci d’éclairage, de démystification de ce que l’on peut appeler le retour du protectionnisme qui apparaît selon certains observateurs comme dénué de sens et contradictoire avec la libéralisation des échanges formalisés par la création de l’OMC
». Au delà d’un travail comparatif de la plus haute importance on ne pouvait s’empêcher d’observer que ce colloque était aussi l’occasion pour le Gouvernement français d’afficher clairement sa position et l’occasion de faire passer un message vers les USA selon lequel la France n’était plus disposée à se laisser dépasser par un discours et des pratiques contradictoires, et ce d’autant que les pratiques de l’Union Européenne ont fait de l’Europe la zone la plus ouverte au monde et la moins protégée en la question. Ainsi Bernard Carayon ne manquait pas de rappeler que : «Les Etats Unis sont un modèle d’efficacité mais qui s’avère souvent en contradiction avec les règles d’équilibre des échanges et de transparence qui doivent prévaloir. Les Etats Unis s’affichent comme un parangon du libéralisme et offrent souvent le visage d’une nation qui préconise l’ouverture des marchés et l’impose parfois à travers des jeux d’influence dans des organisations internationales. Mais sur leur territoire, les Etats Unis exercent un contrôle pointilleux sur les investissements étrangers, assurés par la CFIUS (Committee on Foreign Investments in the United States)». Rappelons à cette occasion que Bernard Carayon, Député du Tarn est l’un des parlementaires les plus engagés dans les domaines de l’Intelligence Economique et de Souveraineté Nationale et s’est vu confié à ce titre par le Premier Ministre de l’époque, Jean Pierre Rafarin, une mission d’étude qui a abouti à la parution d’un  rapport intitulé «Intelligence Economique, Compétitivité et Cohérence sociale», publié en 2003 (cf. lien vers le site du Député Carayon dans le cadre de ce dossier) ainsi que les rapports d’information n°1664 du 9 juin 2004 sur «la Stratégie de Sécurité Economique Nationale» et n° 2299 du 10 mai 2005 sur «Les Nouveaux Outils de la Politique Industrielle».

Le Patriotisme économique en réponse au dilemme investissements étrangers / sécurité nationale
Bernard Carayon  en introduction du colloque cite le mot nouveau qui est maintenant sur toutes les lèvres : «Patriotisme Economique», car c’est bien de cela qu’il va s’agir. Pour lui: «le patriotisme n’est pas un nationalisme ou un protectionnisme. C’est une politique publique nouvelle, une approche mutualiste». Il rappelle à cette occasion l’existence de «secteurs stratégiques», de lutte contre la «déloyauté commerciale», cite les chiffres de l’Ambassade de USA lesquels seraient de 57 milliards de dollars investis aux USA par l’étranger contribuant à près de 50 000 emplois annuels créés et  rappelle une évidence du moment, à savoir que : «partout l’ouverture des marchés dissimule mal le retour des Etats Nation». Il stigmatise ainsi  la légitimité de l’action publique et observe que : «l’ouverture des marchés est un moyen, pas une fin». Après ces mots d’introduction, le colloque est ouvert par l’allocution de Michèle Alliot-Marie, Ministre de la Défense (cf. discours du Ministre). S’agissant des investissements étrangers dans des entreprises françaises et concernant un domaine qui est dans ses attributions, à savoir la sécurité nationale, Michèle Alliot-Marie devait rappeler : «on est dans un domaine où la naïveté ne peut être de mise. Les pays libéraux se protègent des approches étrangères par des moyens divers et efficaces» et de préciser cependant : «le patriotisme économique ne peut être et ne doit pas être un nouveau protectionnisme». Le Ministre égrainait alors une liste de «bonnes pratiques» qu’il conviendrait de respecter : «savoir maîtriser ses dépenses, ne pas être soumis au bon vouloir d’un fournisseur étranger, prendre en compte la notion de domaines sensibles, être non dépendant stratégiquement ...». Michèle Alliot-Marie devait toutefois mettre le doigt sur un point qui de toutes évidence est celui qui est sensible : «il existe à priori des raisons idéologiques contre la mise en place des fonds de pension. Notre économie paie ainsi un coût, faute d’en reconnaître l’intérêt. Les investissements étrangers ont toute leur place dans le développement économique français. Il convient de les encourager en veillant à leur maîtrise...». Ainsi il reviendrait au Conseil Economique de Défense d’assurer la maîtrise des investissements étrangers pour ce qui le concerne en s’appuyant sur une politique industrielle volontariste. De là  une série d’étapes : identification des entreprises stratégiques (PME/ PMI...les plus petites), développement de la culture de l’Intelligence Economique, notamment dans les petites entreprises, sélection des "vrais" dossiers stratégiques... et le Ministre de rappeler : «pas de manipulation par des intérêts privés, je serai intraitable sur ce point», apprendre à travailler à la vitesse du monde des affaires en ne créant pas une nouvelle bureaucratie qui pourrait entraver la marche, ne pas seulement faire réponse aux contraintes et aux évolutions réglementaires, d’où la mise à disposition d’une véritable «boite à outils»: accompagnement financier de la recherche, sanctuarisation de la recherche amont, l’Etat devant donner l’exemple, mise en place des pôles de compétitivité, mise en place de fonds d’investissements de confiance pour les dossiers les plus délicats (mobilisation du Ministère de la Défense pour cela), accompagnement du développement des jeunes entreprises, orientation de l’épargne des Français vers le long terme et dans le développement des entreprises, avantages fiscaux orientés vers les PME/PMI, les entreprise non cotées. Enfin ces dispositions devant s’inscrire dans une perspective européenne, Michèle Alliot-Marie devait à cette occasion faire passer un message plus politique: «à nos amis américains je me dois de dire clairement que nous ne souhaitons pas élever des murailles entre l’Europe et la France mais rester maîtres de notre destin et assurer un traitement égal au niveau industriel et commercial...». D’où un message tout aussi clair envers les décideurs industriels et politiques pour «lutter contre les dérives protectionnistes afin d’éviter une multiplication de contrôles au détriment d’une Europe forte...». De là une nouvelle liste en forme de "fiche de route" pour l’Europe: «reconnaître les spécificités des secteurs essentiels à notre sécurité, permettre à l’Europe de construire sa politique industrielle dans une politique de long terme, mettre en place l’intelligence économique pour l’excellence de la technologie et de la compétitivité». Dés lors il ne s’agirait pas «de protectionisme mais d’une ambition pour l’Europe». D’où in fine une feuille de route aussi pour la DGA : autonomie compétitive, relance de la recherche en tant que priorité et information intéressante : «place déterminante de la défense dans la nouvelle Agence de la Recherche. Rôle essentiel dans les pôles de compétitivité».  Le Ministre de la Défense devait terminer par ces termes : «le patriotisme économique que j’appelle de mes voeux doit être une véritable stratégie de long terme, l’expression d’une politique et non une réponse au cas par cas» et définitivement conclure par : «j’assume entièrement cette responsabilité car j’ai cette ambition pour la France et pour l’Europe».

Suivait une intervention de Thomas T. White (en remplacement du Sénateur Chuck Hagel retenu à Washington ) sur l’US Investment Policy and the National Security Policy. Monsieur White depuis septembre 2003 occupe la position de Ministre-Conseiller pour les Affaires économiques à l’Ambassade des Etats Unis à Paris. Ancien Ministre à l’Ambassade de Monrovia (Libéria) et Négociateur International, il a dans le passé servi  le State Department à Washington, Jérusalem, en Italie et au Brésil. Rappelant que les Etats Unis sont la seconde économie la plus efficace au monde il saisissait l’occasion pour rappeler que la politique américaine d’investissement par l’étranger est fort ancienne puisqu’on peut la faire remonter à Hamilton, Président du trésor sous l’administration de Georges Washington. Elle contribuerait aujourd’hui de l’ordre de 5,8% du produit intérieur. Il stigmatisait toutefois le point central qu’avait déjà mentionné Madame Alliot-Marie : «foreign investment must be carried-out in a form that is compatible with our national security», et de citer les «nuclear facilities...» et autres activités de l’ordre de la sécurité nationale. Pour lui il n’existerait cependant pas de dispositif permettant de passer en revue les investissements étrangers mais plutôt un système volontaire de contrôle des points de l’ordre de la sécurité nationale, renvoyant le détail de l’amandement Exon-Florio pour la suite des discussion (cf. Gay Sills et Jeanne Archibald). Thomas T. White devait terminer son intervention sur une anecdote historique et synthétique dont les américains sont toujours friands: «Christopher Columbus needed international capital and technology... ». Comme quoi le présent débat ne serait pas si nouveau que cela.


Table ronde 1  Les enjeux : un juste équilibre entre sécurité nationale et liberté d’investissement
Présidée par Axel Poniatowski, Président du groupe d’Amitié France Etats-Unis à l’Assemblée Nationale. Modérateur, notre confrère Gérard Bonos, Directeur de la rédaction de Radio Classique

Devaient ainsi intervenir à la tribune : Jean Paul Bechat, Président de Safran, Clara Gaymard, Présidente de l’Agence Française pour les Investissements Internationaux (AFII), Jean-Louis Gergorin, Directeur de la coordination stratégique du groupe EADS, René Proglio, ancien Partner de Arthur Andersen et actuel Managing Director de la banque d’investissement Morgan Stanley, Thomas J. White, Conseiller d’Ambassade précédemment cité et le Docteur Philippe Pouletty, Président du Conseil Stratégique de l’Innovation, Président de France Biotech, Vice Président d’Europabio, membre du Conseil de l’Attractivité de la France auprès du Premier Ministre et Directeur de Truffle Venture, un fond de capital risque de 100 ME destiné au financement des hautes technologies et des Spin-Offs.

Cette table ronde était ouverte par Axel Potniatowski qui rappelait à cette occasion les propos du Commissaire européen Mandelson qui récemment indiquait: «le marché européen est le plus ouvert au monde alors que l’on est paradoxalement les plus critiqués par les pays en voie de développement, notamment au niveau agricole...». Après avoir rappelé les méthodes classiques de protectionnisme: taxes, subventions, investissement via les politiques de défense il rappelait que: «les américains sont relativement protectionnistes. Les USA sont plus nationalistes et souverainistes  que la France habituée à partager avec les pays de l’Union». Les caractéristiques de la méthodologie protectioniste US serait les suivantes: défense peu ouverte, interventionnisme des élus US assez fort (ex agro, sidérurgie, textile, & aéronautique, télécom, énergie...) avec tout un arsenal d’outils: préférence de fait pour des accords bilatéraux, principe de FSC pour subventionner l’industrie, politique monétaire fine et intelligente sur le Dollar qui reste sous-évalué depuis une quarantaine d’années, pragmatisme de l’administration Bush illustrée par une politique d’incitation aux retours des bénéfices vers les USA par un niveau d’imposition des bénéfices limité à 5,5% seulement.   Bien sûr les USA auraient de bonnes raisons pour applquer des règles protectionnistes. A titre d’exemple certains secteurs auraient été sérieusement touchés. Entre 1980 et 2005 le nombre d’emplois dans le secteur manufacturier serait passé de 20 millions à 15, avec une accélération toute récente qui veut qu’aujourd’hui les 2/3 des améliorations résultent de gains de production et 1/3 des délocalisations, ceci expliquant cela. Ceci dit la croissance aidant le pays se serait ouvert aux échanges extérieurs, leur part passant de 20% en 1980 à 25% aujourd’hui. Autre élément de comparaison cette fois-ci au bénéfice des USA, le subventionnement à l’agriculture. Il serait de 0,2% du PIB aux USA contre 1,3% en France. D’où cette remarque: «je considère que la France et l’Europe subventionnent trop le présent et pas assez l’avenir. On a un goût immodéré des subventions pour ce que l’on a plus alors que les USA subventionnent plutôt les technologies d’avenir». Ainsi un rappel: le budget US de la défense serait de 500 milliards de Dollars contre 160 pour l’Europe pour un équivalent de 500 milles hommes/an aux USA contre 1,4 millions en Europe. D’où une dépense en Europe qui est visiblement plus liée au fonctionnement qu’à l’investissement. Ainsi la décision de Michèle Alliot-Marie pour l’investissement en recherche amont serait le «bon choix».  Clara Gaymard devait embrayer dans la suite sur le mode «on n’a pas de leçons à recevoir de l’étranger sur nos capacités d’investissement étrangers». Ainsi nous aurions  16 000 entreprises étrangères sur le sol français, 1/3 de Français travaillerait pour l’étranger et 600 entreprises françaises auraient été vendues à l’étranger cette dernière année. Dans le même ordre d’idée, bien qu’avec une proportion supérieure, les entreprises du CAC 40 seraient détenues à 40% par des fonds étrangers pour un montant de l’ordre de 450 milliards d’Euros. Enfin depuis 2003 l’investissement étranger en France aurait augmenté de 20% créant du coup 33 000 emplois. On aurait par contre certainement «beaucoup à apprendre en terme de communication», mais de donner pour preuve d’une progressive amélioration le publi-rédactionnel de Toyota paru dans l’édition du jour de l’International Herald Tribune lequel ventait l’intérêt reconnu par Toyota de travailler avec les Français. Ainsi ce problème de communication serait un point faible pour lequel il pourrait être observé en général: «que l’on n’est pas outillés pour vendre notre politique et nos réformes» et qu’il conviendrait de savoir «déjà vendre ce qui est fait». Devait suivre l’exemple du WEF où malgré de bon scores pour la France d’autres sauraient mieux communiquer sur leurs chiffres. Suivait un plaidoyer sur la façon de défendre nos technologies, et d’abord la propriété intellectuelle: «si on a perdu la bataille du Hardware informatique on a pas perdu la bataille de l’intelligence, exemple Dassault Systèmes, Atos, jeux vidéo...», puis le soutien aux Start-Ups «où il est clair qu’il y a absence de Business Angels et de fonds de pensions» et enfin l’acceptation de la culture de l’échec, et de citer «Fedex ou encore Dell qui ont perdu de l’argent pendant 8 ans avant d’en gagner». En faisant ainsi il serait plus facile de valoriser les entreprises et celà permettrait de résoudre la question des délocalisations, et ce d’autant que: «on a des Leaders mondiaux dans les divers secteurs, or il y a relocalisation de la production là où l’on vend
» et qu’enfin «2 millions d’emplois seraient possibles dans les services» pour gagner la bataille de l’emploi. Jean Paul Beuchat donnait dans la suite le point de vue de Safran (ex Snecma...) groupe sensible qui compte pas moins de 16 000 employés à l’étranger dont plus de 2000 aux USA : «on parle de capital de Snecma sensible mais je dois rappeler que depuis de Gaulle on est détenu à 10,9% par Pratt & Whitney. Récemment le gouvernement voulait une privatisation de Snecma car sensible mais non régalien. On a défendu le point de vue du mélange de la mécanique et de l’électronique lors  de la constitution de Safran. Les médias ont parlé de carpe et de lapin». Le résultat serait selon lui satisfaisant : «si on a pas les fonds de pension au moins on a l’actionnariat salarié à hauteur de 20% aux côté de BNP, Caisse des Dépôts, Areva. On a une capacité à produire des systèmes d’arme avancés complets. Exemple avec le Rafale réalisé avec Dassault, Thalès et Safran ». Pour la suite il pense qu’il faudrait «explorer la voie des fonds de pension surtout pour les petites entreprises ; On y réfléchi avec un partenaire : défense Conseil International». Jean Louis Gergorin devait prendre la suite pour EADS, exemple même de groupe Européen sensible. Il ne manquait pas de rappeler l’enjeu de la globalisation pour les technologies avec une image forte : «Il y a une dynamique de la globalisation. Il faut toujours avoir une technologie d’avance pour que la France ne devienne pas un grand parc d’attraction pour riches asiatiques dans 20 ans». Il rappelait d’autre part que s’il existe une logique capitalistique elle n’était pas suffisante : «Si nous étions mus par une simple logique capitalistique nous délocaliserions plus. L’ancienne direction de Boeing était allé loin dans cette voie, ils vont maintenant être plus prudents en la matière». Et de citer Nokia : «là ils ont conservé les centres de recherche en Europe et en Finlande». D’où la conclusion: «comme on n’a pas que des Edges Funds on reste localisés». Et d’observer que si Dassault avait abandonné Dassault Système les centres de décisions seraient aujourd’hui aux USA. Aussi le contrôle des centres de décision serait absolument «essentiel» d’autant que certains pays comme Singapour où la Chine veulent avoir la maîtrise de tous les domaines sous 20 ans et pour la Chine le Leadership mondial dans 50 ans.  Aussi : «le défi central c’est donc de conserver les centres de recherches et de décisions. Il est légitime que les Etats veuillent conserver ces privilèges. D’autant que tout cela a été créé sur argent public: avances remboursables et soutiens militaires aux USA. En 1969 les Etats on créé le consortium Airbus, ce ne peut être perdu par la Communauté. C’est ce qu’on dit Michèle Alliot-Marie et Bernard Carayon. Il ne s’agit pas de mécanismes de fermeture mais  de préservation. Cela existe aux USA depuis la Guerre froide». Il devait aborder par la suite deux points tout aussi importants: la législation Exon-Florio aux USA et la structure du capital d’EADS. S’agissant d’Exon Florio: «nous n’avons pas de problème avec cette législation car elle est contraire à l’intérêts des Etats Unis sur le point de l’export de licences qui via le State Department force les étrangers à devenir autonomes. C’est contre-productif». Pour ce qui est du capital d’EADS il rappelle qu’il était «plutôt partisan de la Golden Share mais que les Allemands n’en voulaient pas. Aujourd’hui la Holding Franco-Allemande contrôlant le groupe détient 60 % du capital d’EADS ce qui fait que l’entreprise ne peut échapper à la volonté française». Mais il devait rappeller qu’il n’y avait pas de divergence centrale entre Français et Allemands: «les Allemands qui étaient très libéraux avaient en fait des motivations similaires. Il ne s’agit pas de diriger mais de faire en sorte que ça reste sous contrôle européen». Il devait conclure sur la nécessité de développer des fonds de pension européens et notamment français, car: «les Edge Funds, où fonds spéculatifs , on ne sait pas très bien ce qui est derrière». A la suite de cet ensemble d’interventions, qui bien que souvent critiques à l’égard de la France n’hésitaient pas à  se rallier en grande partie au Patriotisme Economique proposé par le Gouvernement, Philippe Pouletty, qui rappelait d’entrée que Truffle Venture était un fond d’investissement et pas un Edge Fund,  se faisait moins enthousiaste : «tout cela renforce la crainte que j’avais avant de venir!.. Il y a confusion entre sécurité nationale et modèle de développement économique». Ainsi sous couvert de sécurité Philippe pouletty pense que l'on pourrait faire preuve d’un protectionnisme dangereux. Et de rappeler que «les grandes entreprises sont issues de Start-Up dont les centres de décisions ne sont pas partis». et de poursuivre par:  «attention à ne pas faire de protectionnisme car ça fait fuir les investisseurs. Il faut un effet de levier de l’Etat sur les investissements. Le but d’un investisseur c’est de faire des profits». Et de stigmatiser au passage le fait que l’on aurait pas de «politique cohérente des PME. Le plafonnement à 8000 Euros des incitations fiscales va tuer le Capital Risk. Il ne sert à rien de faire de grands discours, il faut de la cohérence. L’épargne des Français est colossale. Il existe l’Assurance Vie qui va dans l’Immobilier et le remboursement de la dette ... mais pas dans les PME».  Et de rappeler les propositions d’un Ministre des Finances récemment, avant que son successeur à Bercy ne s’en occupe pas trop selon lui: «les assureurs s’étaient engagés à hauteur de 6 milliards d’Euros... On a rien vu». Confirmant pour terminer son point de vue sur les fonds de pension «Genentech, Yahoo, Google créé en 1997... le Nasdaq est fuelé par les fonds de pensions», Philippe Pouletty rappelait que si le financement n’était pas suffisant encore fallait-il avoir aussi des centres d’excellence pour la recherche: «pourquoi Boston etc ? parce que l’excellence ! Il faut réformer l’Université. Sans centres d’excellence on ne peut-être attractifs». Et de citer le projet d’Institut Européen des Technologies de Paris pour damer le pion au MIT. Thomas J. White intervenait presqu’en conclusion de la table ronde pour confirmer au moins un point qui apparaît très clairement comme le problème américain du moment : «Decision making should take place in the market ! That’s the place it should be. However we must take care that the market place does not move decision outside. We have a problem in the US : decision making is moving outside»! Ce que confirmait d’une certaine manière Jean Louis Gergorin qui observait sur l’exemple de son concurrent Boeing que c’est le marché qui a été bien  souvent à l’origine d’un manque d’investissement long terme: «une des raisons du succès d’Airbus c’est l’investissment à long terme. Boeing a été un des premiers de Wall Street à ne pas renouveler ses produits sous la pression des actionnaires. Heureusement les développements militaires ont permis des recherches dont on trouve le résultat aujourd’hui sur le 787».  Et de donner des exemples où c’est plutôt l’Europe qui a gagné : A 400 F et Skynet 5 contre Lookeed Martin.


Table ronde 2 Les dispositifs de contrôle : appréhender les législations françaises et américaines
Présidée par Bernard Carayon, Député du Tarn.  Modérateur, notre confrère Pascal Junghans, Journaliste de La tribune.

Devaient intervenir Jeanne Archibald, Partner de Hogan & Hartson et Dirke Besse représentant le bureau de Berlin. Madame Archibald était avant de rejoindre le cabinet Hogan & Hartson  le Directeur juridique du United States Department of Treasury  où elle a participé à la rédaction de la réglementation Exon-Florio sur le contrôle des investissements étrangers aux USA. Elle a par ailleurs participé à la mise en œuvre des sanctions économiques dans le cadre des accords du GATT et a travaillé au comité du budget au Congrès des Etats Unis. François-Henri Briard, Avocat au conseil d’Etat, Vincent Guitton, du Ministère des Finances, Chef du bureau des Services  de l’Investissement et de la Propriété Intellectuelle à la Direction Générale du Trésor et de la Politique Economique (DGTPE), et donc à ce titre l’homme qui en France traite les dossiers concernant les investissements étrangers dans les domaines sensibles et Gay Sills, Présidente du CFIUS, the US Commitee on Foreign Investments des USA au Treasury Department. A ce titre Madame Sills instruit les dossiers qui sont au titre de la législation Exon-Florio transmis au Président des Etats Unis afin de bloquer dans certains cas touchant la sécurité nationale les investissements étrangers projetés sur le territoire US ou dans des entreprise US. 

Gay Sills devait ainsi rappeler le mode de fonctionnement de la protection contre les investissements étrangers aux USA dans le cadre de la législation Exon-Florio: «La première disposition a été la législation Exon Florio. Aux USA, il n’y a pas de définition de la sécurité nationale. Seul le président de Etats Unis peut décider. De là une interprétation qui peut-être large. Si une compagnie étrangère achète une entreprise Us les deux entreprises doivent soumettre au CFIUS un dossier, que cela concerne des activités Classifed ou Unclassified. Là , il y a un cycle de vérification qui prend 30 jours (éventuellement 90) et le dossier part vers le Président des Etats Unis qui a 15 jours pour trancher. Au bout du compte la Maison Blanche publie un Communiqué de Presse». Ce à quoi notre confrère Pascal Junghans rétorque : «ce qui me frappe c’est la souplesse de cet amandement et qu’il n’existe pas de définition de l’intérêt national, et qu’ainsi seul le Président décide» ! Vincent Guitton de la DGTPE, et à ce titre l’homme qui traite les dossiers dans le cas d’investissement étrangers en France, rappelle ensuite l’historique et la position actuelle de la France : «En France, on avait un système très élevé de contrôles des investissements. Avec les traités communautaires qui sont entré en vigueur plus l’OCDE on a un système résiduel qui est maintenant très limité». Mais il observe que l’investissement étranger est essentiel et qu’il n’est pas question qu’il y ait des contrôles qui limitent les investissements sauf en cas de sécurité. D’où les décrets pris  dans l’été: «ce qui est soumis à l’autorisation du Ministre de l’Economie c’est l’investissement où il y a prise de contrôle des portefeuilles avec plus de 33% des droits de vote. Le décret de 2003 définit les secteurs sensibles d’après des motifs de sécurité et d’ordre public». Il a donc été fait un distinguo entre sécurité publique liée à la défense et ordre public plus lié aux jeux d’argents et activités de ce type. Lorsqu’un dossier est retenu par les services de la DGTPE il y a dans le cas de la sécurité saisine du Ministère de la Défense et dans le cas des jeux ou activités assimilées saisine du Ministère de l’intérieur. De là un dialogue. S’il y a problème il est fait demande à l’investisseur de clarifier sa position sur les brevets qui risquent de quitter la France ou encore il est demandé des engagements concernant la sécurité sur le site d’activité. Il y a obligatoirement échange de lettres entre l’investisseur et le Ministère. Cette pratique ne serait pas nouvelle puisqu’elle fonctionnerait depuis 1989 et aurait déjà traité 5000 affaires, dont 100 de manière approfondie avec seulement 2 refus du Ministère des Finances. Pour Vincent Guitton: «ce n’est donc pas un frein ou une entrave». Le soucis serait en fait de faire preuve ‘utilité (critères objectifs, listes d’activités soumis au contrôle, réglementations spécifiques...), présivibilité et transparence. Jeanne Archibald qui avait travaillé sur la législation Exon-Florio donnait dans la suite le point de vue américain en allant au delà de la description faite par Madame Sills et en se référent aux travaux du Congrès auxquels elle avait participé. : «il y a eu pas mal de discussion au Congrès sur ce qui pouvait être racheté ou non. Les nombreux rachats dans le secteur des télécom en forte croisance dans les années 90 avait pu avoir leur autorisation sous 30 jours au déut puis cela avait pris plus de temps lorsqu’il y avait intervention du FBI ou du Département de la Défense. Investissement impose une menace à laquelle nous répondons par un niveau de contrôle gouvernemental qui doit rester acceptable». François Henri Briard donnait ensuite un éclairage sur le contentieux : « on l’a vu les cas de refu sont rare mais le débat est très présent car notre réglementation évolue sous la pression de la Cour de Justice Européenne, suite entre autre à une attaque au Luxembourg, et un auprès du Conseil d’Etat demandé par l’Eglise de Scientologie». Aussi observe-t-il une grande différence avec les USA dans le cadre de la défense de l’ordre public : «notre réglementation a été condamnée car trop floue ». De même observe-til une différence avec Exon-Florio : «il existe en France des voies de recours extrêmement effectives, à la demande de personnes morales en cas de refus. Il peut y avoir contentieux à l’égard des injonctions ou recommandations dites L151. Il s’agit alors d’un recours de plein contentieux qui permet au juge administratif de prendre en compte les motivations de la décision, notamment la nature de l’objet d’investissement  (cf. conclusions de l’avocat général dans le cas de l’affaire de l’église desscientologie), il peut aussi y avoir contrôle de fond. Le conseil d’Etat a statué sur une affaire de droit Alsacien lié à une entreprise US qui finançait Usama bin Laden. Enfin il peut y avoir incompatibilité du Décret avec la liberté de circulation des capitaux : on trouve là l’orogine du succès du recours de l’Eglise de Scientologie».

Suivaient à cette table ronde l’intervention de H. P. Goldfield ancien conseiller juridique du Président Reagan, maintenant co-Directeur de Stonebridge LLC ainsi que Olin Wethington, Conseiller du Secrétaire du US Commerce Department. H.P. Goldfield rappelait la nécessité de devoir «assurer un équilibre entre la sécurité nationale et la croissance de l’économie». Olin Wetington de son côté confirmait ce nécessaire équilibre entre sécurité et économie et devait préciser : «les menaces sont réelles, tournoyantes, avec des acteurs institutionnels et non institutionnels. Les marchés sont en fait universels aussi les technologies comme les capitaux s’écoulent librement. Nous devons voir les préférences nationales comme une réalité. Trouver l’équilibre exact entre investissement et sécurité . Nous devons vraiment trouver cet équilibre ». Ainsi il observe que certains points ne rendent pas cette tâche des plus faciles : «La pente glissante c’est que toute technologie devient [au bout du compte] un avantage national » , et conclue « qu’il faudrait prendre des mesures de compromis qui ne se referment pas sur des intérêts uniquement de sécurité nationale, car les USA et l’Europe ont déjà fait un long chemin vers l’ouverture ». Et s’agissant de la Chine il précise : «nous ne devrions pas faire preuve de présomption contre de tels investissements. Nous devrons continuer à traiter cela au cas par cas». Il rappelle à ce propos que la Chine est devenu le Leader mondial de l’ouverture aux  investissements étrangers (~ 1 000 milliards de Dollars !) . Il observe toutefois  qu’i l  y a lieu de rester prudent en raison d’un état de corruption croissant et d’un manque total de contrôle sur les risques financiers, rappelant au passage l’inconsistance politique du pays  et le manque de confiance des Chinois de la majorité des Chinois dans leur propre avenir  illustré par leur tendance à épargner. On le voit les appréciations les plus diverses étaient présentes pour ce colloque de l’Assemblée Nationale. Suivait la dernière table ronde.


Table ronde n° 3 Les partenariats : l’intervention du secteur institutionnel dans l’accompagnement stratégique
Présidée par Jean Arthuis, Sénateur de la Mayenne, ancien Ministre de l’Ecomonie et des Finances et animé par Jhon vinocur l’éditorialiste célèbre de Herald tribune (rplct), table ronde à laquelle devait participer Jean Michel Boucheron, député d’Illle et Vilaine, Charles de Croisset, Vice Chairman de la banque d’affaire Goldman Sachs Europe, Pascal Dupeyrat, Consultant en Affaires publiques du cabinet Relians Consulting,  Winston Maxwell, Partner de Hogan & Hartson et membre du bareau de Paris à New York, Frédéric Puaux, Responsable des dossiers de financement et stratégie auprès d’Alain Juillet , le Haut Responsable chargé de l’Intellingence  Economique au Secrétariat Général de la Défense Nationale (SGDN) et Denis Ranque , Président de Thalès.

Le colloque était clôturé par Bernard Carayon après une allocution de Monsieur Craig Stapleton, Ambassadeur des USA en France qui ne manquait pas à cette occasion de rappeler l’amitié franco-américaine et remerciait le gouvernement et le peuple français pour leur soutien lors de l’Ouragan Katrina qui quelques semaines auparavant avait détruit la Louisiane.


Bertrand Villeret
Rédacteur en chef, ConsultingNewsLine





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SN











BC
Bernard Carayon, Député: Partout l'ouverture des marchés dissimule mal le retour des Etats nations. Le Patriotisme Economique n'est pas un nationalisme ou un protectionisme. C'est une politique publique nouvelle...

Michèle Alliot Marie
Michelle Alliot Marie, Ministre de la Défense: Le Patriotisme Economique que j'appelle de mes veoux doit-être une véritable stratégie de long terme, l'expression d'une politique, pas une réponse au cas par cas. Ce n'est pas du protectionisme mais une ambition pour l'Europe...

Thomas J White
Thomas J White, Conseiller auprès de l'Ambassadeur des USA en France: Foreign investment must be carried-out in a form that is compatible with our national security...  We have a problem in the US: Decision making is moving outside. Decision making should take place in the market, that's the
place it should be !..


Clara Gaymard
Clara Gaymard, Présidente de l'Association Française pour les Investissements Interna(ionaux (AFII) expose la présence française dans l'édition du jour du Herald Tribune

Jean Louis Georgerin
Jean Louis Georgerin, Directeur de la Coordination stratégique d'EADS : Il existe une dynamique de la globalisation. Il convient d'avoir toujours une tecgnologie d'avance pour que la France dans 20 ans ne soit pas un grand pac d'attractions pour touristes asiatiques...

Philippe Pouletty
Philippe Pouletty, Président du Conseil  Stratégique de l'Innovation, Président de France Biotech et DG de Truffle Venture exprime la crainte partagée par certains opérateurs économiques: Attention à ne pas faire de protectionisme, ça fait fuir les investisseurs... Il faut réformer les Universités, sans centres d'excellence on ne peut être attractifs !..

Gay Sills
Gay Sills, from US Treasury Dept, and President of Committee on Foreign  Investments (CFIUS) : Exon Florio came first to protect national security. But there is no definition of national security. It can be interpreted broadly. It is up to the US President to decide. After a 30 days review period the President has 15 days to act..  Then there is a White House press realease ..

Vincent Guitton
Vincent Guitton, Chef du bureau des services de l'investissement et de la propriété intellectuelle à la Direction du Trésor et de la Politique Economique (DGTPE).: En France on avait un système très élevé de contrôle des investissements. Avec les traités communautaires qui sont entrés en vigueur plus l'OCDE on a un système résiduel qui maintenant est limité... 

Jeanne Archibald
Jeanne Archibald, former Juridic Head of US Dept of Treasury, Partner at consultancy Hogan & Hartson : There is a lot of discusion in the Congress at the moment. Investment impose a threat so we must consider an acceptable level of government control. The 1990's have seen an increasing protection of acquisition in Telecom sector. The Governement clearance is 30 days at begining then get longer with the the FBI and DoD...  

H. P. Goldfield
H.P.Goldfield, former Assistant Secretary of Commerce in charge of Trade Development and Advisor to the US President Ronald Reagan, currently Co-Director of Stonebridge LLC:  balancing national security with economic growth.  We have billions $ of investments in China and Thousand of billions in reserve in the coming years...

Olin Wethington
Olin Wethington, Councelor to the Secretary of the US Deprt of Commerce and former advisor of Georges H.W. Bush in the 90's:   Threats are real,  revolving, with state actors and non state actors. Markets are in fact universal so technology can flow freely. THe slippery slope is that any technology become a national asset !..

Jean Arthuis
Jean Arthuis, Président de la Commision des Finances du Sénat, ancien Ministre de l'Economie et des Finances présidait la dernière table ronde concernant l'intervention du secteur institutionnel dans l'accompagnement stratégique des partenariats.

Frédéric Puaux
Frédéric Puaux, Administrateur civil hors classe  en charge des dossiers juridiques, financiers et stratégiques auprès d'Alain Juillet, Haut Responsable de l'Intelligence Economique au Secrétariat Général de la Défense Nationale (SGDN), devait exprimer le point de vue du SGDN.

Pascal Dupeyrat
Pascal Dupeyra, Consultant en affaires publiques et Lobbying du cabinet Relians Consulting


Winston Maxwell
Maître Winston Maxwell, membre du Barreau de Paris à New York et Associé du bureau parisien du cabinet  Hogan & Hartson. Un des meilleurs spécialistes des fusions  - acquisitions de la place.

Charles de Croisset & denis Ranque
Denis Ranque, P-dg de Thalès et Charles de Croisset,  Vice Chairman Goldman Sachs Europe

Craig R. Stapleton,
Craig R. Stapleton, Ambassadeur des Etats Unis en France devait adresser un message à l'assistance, avant que Bernard Carayon ne clôture définitivement le colloque. A cette occasion Craig Stapleton remerciait le gouvernement et le peuple Francçais pour son assistance  en Louisiane après le passage de l'Ouragan Katrina.


Images: B; Villeret, Quantorg 2005

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