Disparition 
12  11 2005  
International 

Peter Drucker

Peter Drucker n'est plus. Economiste de renom, il a été pendant près d'un demi siècle l'inspirateur du management à l'occidentale et le conseiller des plus grands de ce monde.

Auteur d'une trentaine d'ouvrages traduits dans plus de 30 langues, le travail de Peter Drucker a influencé la majorité des capitaines d'industrie et de nombreux hommes politiques au nombre desquels Winston Churchill et plus récemment Bill Gates et Jack Welch. Cette connaissance personnelle des grands hommes qui cherchaient en lui un mélange de conceptuel et de pragmatisme lui permettait en retour de juger les décideurs de manière originale. Son préféré semble ainsi avoir été Harry Truman derrière lequel il inscrivait facilement Ronald Reagan, avec à chaque fois des raisons qui dépassaient les simples lieux communs. Il est vrai que sa vie avait commencé dans l'Autriche pré-Hitlérienne et devait s'achever dans l'Amérique post-Enronnienne qui avait vu le n° 1 de l'audit mondial, Arthur Andersen disparaître.
De ses origines et de ce qu'il a vu on comprend qu'il se soit toujours réclamé du libéralisme et de la liberté des marchés mais qu'il ait toujours manisfesté de sérieuses réserves envers les fondements du capitalisme.

Si Peter Drucker pensait que l'activité de l'entreprise était essentiellement de façonner le consommateur, sa pensée profonde était que le manager est là pour préparer et libérer la capacité des gens à se réaliser. Il n'hésitait pas à scander que les collaborateurs de talent étaient la valeur la plus importante de l'entreprise. Pour lui le bon management ne pouvait qu'apporter l'harmonie sociale et le bien être.  Il était pour le renforcement des pouvoirs des employés et contre la main mise des appareils d'Etat gérontocratiques.

Apôtre inconditionnel de la privatisation et de l'entreprise en tant qu'institution sociale, ses détracteurs lui reconnaitrons au moins l'invention de 3 concepts d'actualité: la notion de "travailleurs du savoir", le "management par objectifs" et la "décentralisation comme fondement de l'organisation", concepts qui démontrent à tout jamais son
caractère visionnaire.

Peter Drucker est né à Vienne le 19 novembre 1909.  Il commença sa carrière comme journaliste dans le milieu financier de Francfort, ville où il obtint son Doctorat de droit public et international  en 1931. L'année suivante la publication d'un essai sur un philosophe conservateur lui valu la vindicte du parti national socialiste (NAZI) et conditionna son départ pour Londres où il devait travailler dans la banque et faire ses premières gammes en économie. En 1937 il passe aux USA et correspond avec les journaux anglais. Il publie son premier ouvrage "The end of the economic man, The origin of totalitarism" en 1939, ouvrage prémonitoire qui lui vaut l'admiration de Churchill qui en recommande la lecture aux serviteurs de l'Empire britanique.  Sa carrière va ensuite devenir universitaire: d'abord à mis temps au Sarah Lawrance College, puis à plein temps au Bennington college dans le Vermont. En 1943 il sort son second ouvrage " The future of the industry man". Il est alors invité par General Motors à diagnostiquer son organisation, ce qui marque le début de son activité de consultant.  Il y rencontre Alfred P. Sloan.  C'est à l'issue de cette expérience à GM qu'il pubilie "The concept of the corporation" en 1945 qui introduit la désormais légendaire notion de décentralisation des prises de décision et le management par objectifs, décliné en longs et courts temes, ouvrage qui ne lui vaut pas que de la reconnaissance au sein de GM. De là par contre, la reconnaissance du monde du conseil et son accession en 1950 à un poste de Professeur de la Graduate Business School de New York. En 1954 il publie "The practice of management" qui prétend que le "Management" est certainement l'innovation sociale majeure du siècle. Ce livre est connu pour receler les trois questions qui ont fait la gloire de Peter Drucker et le tour du monde des Business Schools: "What is our business? What is our customer, What does he considers as valuable?".   Dans la suite Peter Drucker devait prédire la montée en puissance du Japon puis sa stagnation dans les années 90. Humaniste et pragmatique il annonçait avant l'heure que les retournements de conjoncture économique auraient des conséquences dramatiques si les patrons d'industrie continuaient à se faire payer des salaires mirobolant et des parachutes dorés. L'avenir lui donnera raison. En 1971 il devait rejoindre l'Université de Claremont où il créait le premier MBA pour les personnes en fonction. En 2002 il prenait une juste retraite et recevait du Président des Etats Unis la Presidential Medal for Freedom.

Le 2 décembre 2004 Peter Drucker était l'invité de l'AMCF à l'University Club de New York pour la réception donnée à l'occasion des 75 ans de l'AMCF par Betsy Kovacs. Nous avions projeté de l'interviewer. Il ne devait toutefois pas s'y rendre en raison d'un état de santé précaire. Il s'est éteint le 11 novembre 2005 dans sa maison de Claremont à l'age de  95 ans.

Bertrand Villeret


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