La France a pris du retard dans le développement des calculateurs de haute puissance. Aussi TERA 10, construit par Bull pour la Division des Applications Militaires du CEA, marque-t-il le retour de l'Hexagone dans la course aux capacités de calcul.  Avec quelques dizaines de Téraflops de "puissance de tir" il reste encore loin du peloton de tête, mais l'objectif de TERA, et à terme du nouveau Grand équipement GENCI, est de disposer de 10 Pétaflops à l'horizon 2017

 
Le Top 500 des plus gros calculateurs au monde fait bien peu de place aux entreprises françaises. Le premier classement, établi en 1993, comptait 26 entreprises nationales. Celui de juin dernier n'en compte plus que huit, parmi lesquelles le Commissariat à l'Energie Atomique, Total France, et trois banques. La France est donc aujourd'hui à l'avant-dernier rang européen.

Le CESI, Comité interministériel pour la société de l'information, réuni le 11 juillet sous la présidence du Premier Ministre, a décidé, pour rattraper ce retard, la création du GENCI, le "Grand Equipement National pour le Calcul Intensif". Le GENCI devrait aboutir à la création, dès 2007, d'un centre de calcul, financé par l'Etat (50%), le CEA et le CNRS (20% chacun) et les Universités (10%), pour un budget total en 4 ans de 100 millions d'euros.

D'autres centres de calculs équivalents, mais d'une puissance moindre, regroupent déjà des établissements scientifiques, à l'image du CERFACS, sur la Météopole de Toulouse (CNES, EADS France, EDF, Météo-France, et la SNECMA). Le CERFACS développe des méthodes nouvelles de simulation scientifique, immédiatement appliquées, par exemple, dans les modèles climatiques utilisés par Météo-France pour prévoir l'évolution du climat liée à l'intensification de l'effet de serre. La plupart des domaines scientifiques de pointe nécessitent aujourd'hui des calculs de simulation : nucléaire militaire et civil, climat mondial, nanotechnologies, aéronautique, etc …

Le supercalculateur le plus puissant utilisé en France est aujourd'hui le Bull TERA 10 du Commissariat à l'énergie atomique, avec 42* Teraflops (un Teraflop = mille milliard d'opérations à la seconde), loin devant celui de Total-France, avec seulement 4,3 Teraflops. Si en volume d'équipements la France est loin dans le classement mondial et européen, les créateurs de Tera 10 peuvent se féliciter d'avoir actuellement l'une des machines les plus rapides d'Europe, si ce n'est pas la plus rapide, et Bull son concepteur peut s'enorgueillir d'avoir damé le pion à des concurrents aussi prestigieux que Dell, IBM, HP et Linux Networks pour sa réponse à l'appel d'offre lancé par le CEA.

Mais à peine installé les utilisateurs de TERA 10 laissent déjà transparaître leur attente pour le futur TERA 100 qui devrait apparaître en 2009. Car en effet on assiste à une multiplication par 10 des puissances de calcul requises tous les 4 ans, TERA 10 ayant lui-même succédé fin 2005 à TERA 1 construit par HP pour le CEA et installé il y a peu... en 2001! On comprend dés lors que la course à la puissance ne soit certainement pas gagnée d'avance et que l'écart avec les premiers sera difficile à rattraper.

Le Top 500 de juin 2006 classait en tête l'IBM BlueGene, installé en Californie et doté d'une puissance de 281 Teraflops... Mais on a vu cet été apparaître au Japon une machine dépassant les mille Teraflops, ou 1 Pétaflop, grâce à une nouvelle architecture de processeurs particulièrement rapide.  Il existe un projet à 1 Pétaflop en Chine et les japonais ont déjà annoncé leur futur 5 Pétaflops... Au-delà, on connaîtra, sans doute dans les prochaines décennies, les Exaflops, puis les Zettaflops, et les Yottaflops (10²⁴ flops).

TERA 10 au CEA-DAM marque donc le grand retour de l'Hexagone dans la course aux capacités de calcul. Avec quelques dizaines de Téraflops de "puissance de tir" la France reste encore loin du peloton de tête, mais l'objectif de TERA et à terme du nouveau "Grand équipement" GENCI sera de disposer de 10 Pétaflops à l'horizon 2017. Pour y parvenir et rentabiliser ces équipements, des collaborations européennes pourront être mises à profit, et ce d'autant plus facilement que l'investissement informatique sur les grands équipements semble à l'ordre du jour du 7ème Programme Cadre de Recherche et Développement de l'Union Européenne (PCRD).

Eric Allard

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