Introduction

L'équipe du DESS Européen des Métiers du Conseil de l'Université du Littoral à Boulogne sur Mer, comme chaque année, dans le cadre de son projet international se devait d'organiser un voyage à l’étranger... Pour 2004 la destination choisie était la Tunisie: Monastir, Sousse, Kairouan, Sfax ...

Lorsque l'avion qui les enmène vers l'orient du Maghreb décolle, les " apprentis - consultants" de Boulogne sur Mer ne savent pas encore l'ampleur de la découverte humaine qui les attend. Officiellement leur séjour a deux objectifs : une étude commanditée par la CCI de Boulogne sur le premier port de pêche tunisien, Sfax, et, de manière plus obscure pour eux, la conclusion d’un partenariat entre le DESS et l’Ecole Supérieure de Commerce de cette dynamique ville portuaire. En toile de fond, la découverte d'un pays inconnu, d'une autre culture, d’une autre façon de vivre, d’une autre mentalité, d’une autre religion.... Mais pour l'instant l'avion s'élève doucement et dans le ronron des moteurs on attend patiemment sa petite collation au dessus d'une Méditerrannée qui n'en finit pas d'étaler son ruban lapis lazuli.

Dans un coin de la carlingue on prend quelques notes:

" Tous les étudiants, accompagnés de notre directeur, Jean Lin Chaix et du responsable du projet, Monsieur. Gharbi, sommes partis du 20 au 27 février 2004 à destination de la Tunisie... Nous avons quitté Boulogne sur Mer dans un froid de canard (c’est à dire 0°C) et en 2 heures d’avion, nous devrions arriver dans un pays où d'après ce que l'on dit il ferait en moyenne 18°Celcius" ...

Ce qui est vrai, premier choc !… Plus tard à l'hôtel:

" Durant le week-end de notre arrivée, nous avons pu visiter un peu ce pays qui semble incroyablement beau : Monastir, Sousse, Kairouan .... Kairouan est la quatrième place islamique du monde, flanquée d'une impressionnante mosquée. Notre guide nous a expliqué, dans les grandes lignes, en quoi consistait la religion islamique et ses pratiques: tous les jours cinq prières qui doivent être pratiquées avec des ablutions, des gestes et des versets différents selon le moment de la journée.... Et puis le Ramadan, qui se définit comme un jeûne diurne qui dure un mois… "

Après ce premier week-end de visite culturelle, le travail reprend ses droits. On consigne soigneusement les faits et les découvertes par écrit :

"Durant les trois premiers jours de la semaine, nous nous sommes réellement immergés dans la culture tunisienne. Le choc des cultures n’est pas un simple adage!.."

La dessus les étudiants partent pour Sfax, à trois heures de bus de leur hôtel. Sfax est la deuxième ville économique après Tunis et le premier port de pêche tunisien . Début des bonnes et diverses surprises:

" Nous avons été accueillis par les étudiants de l’ESC et le responsable du projet, M. Bouddabous. Accueillis est un mot de faible sens pour exprimer tant de convivialité, de sympathie, de prévenance et de gentillesse… il n’y a pas assez d’adjectifs pour décrire l’accueil que nous ont réservé les Tunisiens" .

Mais les effets de différence culturelle ont tôt fait d'apparaître :

" la ponctualité n’est pas légion. Ils prennent le temps de vivre alors que, nous, nous paraissions extrêmement stressés et attachés à l’heure. Par conséquent, à chaque rendez-vous, il était coutume qu’il y ait au moins une heure de retard !... Nous avons fini par en plaisanter et surnommions ce manque de ponctualité par « l’heure tunisienne » qui était juste une heure de plus que l’heure prévue.

Ces trois jours de business furent les plus éprouvants de tout le séjour car il fallait aux étudiants mener conjointement les deux objectifs du projet et de manière pragmatique les " boucler ". Ce ne fut aucunement des vacances comme en atteste leurs notes:

" mardi matin 5h30, nous étions tous sur le pied de guerre pour visiter et observer la criée du port de Sfax dans la fraîcheur du petit matin et cette agréable odeur de poisson.... Puis, nous avons visité une usine de transformation des produits de la mer. Notre première vision fut celle de deux femmes en train de travailler dans une salle frigorifique, manipulant à mains nues de la glace avec une pelle pour la placer dans des cageots. Nous fûmes quelque peu choqués par ces conditions de travail... Notre deuxième vision était celle de six femmes assemblées autour d’un lavabo où coulait continuellement de l’eau pour nettoyer les poulpes. Elles n’avaient pas de gants et étaient toute la journée les mains dans l’eau ! Nous étions estomaquées lorsque le guide nous a annoncé que ces femmes gagnaient 1 dinar par heure, ce qui représente environ 0.70 € par heure pour des conditions de travail plus que précaires ".

Après cet intermède qui devait remettre les pieds des étudiants sur terre, ils eûrent l'infime honneur et le plaisir d'accomplir une " petite balade " sur un remorqueur pour observer le port depuis la mer. Une expérience qu'ils n'hésitent pas à qualifier de : " fort plaisante avec un beau soleil et une chaleur agréable ".

Retour à l'hotel. Notes:

" La volonté des étudiants tunisiens, de nous faire connaître, partager et intégrer leur culture, était grande. Lors d’une soirée chez un tunisien, nous avons eu l’opportunité de goûter un couscous au poisson (spécialité tunisienne) préparé par sa mère; Un couscous composé de semoule très épicée et d’une petite assiette de poissons entiers avec la tête et la queue .... Appétissant… La nourriture tunisienne est succulente, épicée et quelques fois pimentée ".

Ceci devait leur valoir quelques surprises et de nombreux verres d’eau engloutis à toute vitesse ! Mais les bonnes surprises abondaient:

" En dessert, nous avons eu droit à une orange qui n’avait rien à voir avec celles que l’on trouve en Europe. Elle était juteuse, gustative et sucrée ... Toute la formation a ainsi pu faire une cure de vitamine C durant une semaine" !..

Après ce fameux repas, les étudiants se devaient d'être conviés à s' asseoir en rond dans un coin du salon où s'étaient rassemblés voisins, amis, et membres de la famille pour une soirée animée par les chants dans la plus pure tradition tunisienne.

Le lendemain matin, nous pensions dormir jusqu’à au moins 8h30 mais à 6h30 nous avons été réveillés par l’appel à la prière au minaret qui était placé juste à côté du foyer où nous étions hébergés. Le foyer était un foyer de jeunes filles et lorsque les garçons de notre formation traversaient ce site, elles les regardaient et les interpellaient. C’était un événement ! Pour nos repas, nous étions invités au restaurant universitaire de l’ESC. La nourriture était posée à même le plateau métallique, donc sans assiette. Il n’y avait pas non plus de couteau. Nous disiosins de succulentes tranches de dinde mais comment les couper sans couteau, je vous laisse imaginer notre surprise et nos difficultés… De plus, nous avions un verre pour 4 personnes, alors nous regardions nos voisins, d’un air soupçonneux pour déceler une quelconque maladie que nous pourrions attraper par la salive ! Mais ne vous inquiétez pas, nous sommes tous revenus, entiers… avec pour quelques personnes, un petit souvenir de Tunisie, des petits dysfonctionnements…

Nous sommes revenus sur Monastir et nous nous sommes arrêtés à El Jem, le plus vieil amphithéâtre d’Europe et surtout le mieux conservé depuis l’époque romaine. C’était vraiment sublime à voir ! Nous étions tous heureux de revenir à l’hôtel et de retrouver notre confort. La veille de notre départ, nous avions quartier libre et en avons donc profité pour faire du shopping dans la médina et les souks. Autre particularité traditionnelle, pour acheter quelques petits souvenirs, nous devions marchander ce qui représentait une réelle difficulté car nous n’avions aucune idée des prix pratiqués: cela permettait d’engager des conversations sur les différences culturelles. «Ne regardez pas les prix, ce sont des prix pour les touristes allemands»... et lorsque nous disions que nous étions de nationalité française, les commerçants divisaient les prix par 10 car nous avions la réputation d’être pingres!

Le lendemain, les étudiants devaient partir après une semaine riche en expériences et en émotions. Le choc ultime fut à la descente d’avion.

Nous avons quitté Tunis à 20°c et lorsque nous avons atterri, nous avons eu droit à une tempête de neige et du verglas à Boulogne Sur Mer !!

Toute la formation est d’accord pour dire que nous nous sommes enrichis humainement au contact d’une culture différente de la nôtre et que cela n’a aucun prix ! Dans un contexte actuel de métissage des populations, il est très important de connaître et d’accepter toutes les cultures, surtout avec l’ouverture de l’Europe qui va accueillir de plus en plus de pays et de néo-européens.

BV : texte extrait du carnet de voyage des étudiants