L'invité de la rédaction

>> Seprembre 2003 
     Altran Technologies: Une ambition intacte 

Interview de Michel Friedlander, Directeur général

Tout marchait bien pour Altran Technologies, devenu enfin et comme prévu le leader européen du Conseil en Innovation, lorsque des rumeurs jettent le discrédit sur le groupe. Le cours de Bourse s'effondre. La Justice est alors amenée à s'intérresser au dossier et les chiffres du groupe s'infléchissent. Les milieux d'affaires s'en étonnent, le marché sanctionne et la concurrence se frotte les mains... Pas pour très longtemps nous assure-t-on du côté du Boulevard Pereire. Michel Friedlander, Directeur général d’Altran Technologies a bien voulu nous livrer son point de vue sur cette « crise de croissance » et les enseignements que le groupe a su en tirer au plan de son organisation

Michel Friedlander, peut-on brosser Peut-on brosser un état des lieux pour le groupe que vous dirigez ?

Michel Friedlander :  2002 a été une année difficile pour tout le monde, en particulier pour Altran Technologies, mais elle doit être considérée en ce qui nous concerne comme une année charnière. Un certain nombre de décisions managériales  et financières ont été prises et des réformes ont été engagées pour nous permettre de tirer les enseignements de la crise que nous venons de traverser, adapter nos structures et mettre notre organisation en ordre de marche pour aborder la nouvelle phase de croissance.


Est-ce à dire que pour 2003 on observerait déjà les premiers signes de croissance ?

Michel Friedlander :  Nous avons publié un Chiffre d'Affaires de 335,1 millions d'Euros au deuxième trimestre 2003. Ce chiffre était en baisse de 5% par rapport au trimestre précédent, en raison principalement d'un plus faible nombre de jours travaillés. Comparativement à nos concurrents, le Chiffre d'Affaires du 2ème trimesre d'Altran s'est révélé supérieur aux attentes du marché et dans la fourchette haute du concensus. L'International pèse désormais plus de 50% dans notre CA et constitue un réel pôle de croissance et de développement pour le groupe. Nous avons ainsi enregistré l'an dernier une croissance organique en Allemagne de plus de 30%  malgré une conjoncture difficile et notre CA y est maintenant supérieur à 100 milions d'Euros. Des résultats semblables sont constatés au Royaume Uni où nos efforts de développement commencent à porter leur fruit. Il serait prématuré de confirmer un retour à la croissance mais la réalité économique du groupe est là et sa capacité à réagir dans un environnement économique difficile, également réelle.


N’y a-t-il pas un risque à faire reposer votre croissance sur des marchés extérieurs ?

Michel Friedlander : Bien au contraire. L'une des clés de notre modèle d'organisation est la diversification des risques. Aujourd'hui les 10 premiers clients du groupe dans le monde ne représentent pas plus que de 17% du CA et les 50 premiers clients n’assurent que 34 % du CA. Cela concrétise bien dans les chiffres la réussite de notre politique de diversification.


Une politique de diversification forcée par les événements ?

Michel Friedlander : Non Il s'agit d'une politique de diversification volontariste. Juqu'en 2001, nous avions multiplié l'activité du groupe par 10 en sept ans et par 4 au cours des quatre dernières années. En un temps relativement court, nous sommes en fait devenu un acteur majeur de la R&D  du paysage industriel. Nous sommes rapidement passé du statut d'acteur français à celui de leader européen du conseil en Innovation technologique.
 


D’où  la nécessité d’ajustements ?

Michel Friedlander : Compte tenu de cette forte croissance, il nous fallait renforcer nos procédures de contrôle interne. Des mesures rigoureuses ont été prises et sur beaucoup de points nous avons tiré les conséquences qui s'imposaient au plan comptable, managérial et judiciaire, lorsque nous estimions que les intérêts du groupe étaient menacés.


Mais comment cela se décline-t-il en terme d’organisation et de stratégie ?

Michel Friedlander :  En décembre 2002 nous avons fait évoluer notre organisation qui comprend désormais, outre le Comité exécutif, un Comité opérationnel coordonnant les 18 périmètres d'activités (chacun placé sous la responsabilité d'un Directeur exécutif) ainsi qu'un Comité d'Organisation dont la mission est d'optimiser la gestion des fonctions transverses. Cette organisation est aujourd'hui pleinement opérationnelle et étendue à l'ensemble du groupe.  Parallèlement nous progressons dans la mise en oeuvre de notre plan d'amélioration de notre situation financière  en nous donnant les les moyens d'une meilleure centralisation de notre trésorerie, d'une réduction de nos comptes clients et d'un retour des niveaux de marges plus satisfaisants. Ce dispositif devrait nous permettre de faire face sereinement à l'échéance de remboursement de notre obligation convertible en janvier 2005. Enfin, 3 nouveaux administrateurs indépendants ont rejoint notre conseil s'administration. Et, comme annoncé lors de l'Assemblée Générale, un Comité d'Audit a été créé en juillet dernier.  


L'évolution de votre organisation a-t-elle un impact sur votre stratégie client ?

Michel Friedlander : Nore structure décentralisée permet aux sociétés du groupe, qui travaillent de manière autonome et bénéficient d'un ancrage local fort, d'être plus proches de nos clients et de leur offrir des services personnalisés et culturellements adaptés. Cette notion de service de proximité est essentielle dans nos métiers. La taille du groupe aujourd'hui et son implantation internationale nous permet d'aller encore plus loin dans ce sens en répondant aux exigences de nos clients qui peuvent se révéler multi-locales. Nous savons aujourd'hui, quand nos clients le souhaitent, mobiliser les sociétés du groupe et répondre à des préoccupations différentes sur plusieurs pays à la fois. 


Comment cela se traduit-il en terme de recrutements ? 

Michel Friedlander : Le groupe a adapté sa politique de recrutement pour tenir compte de données évidentes liées à l'environnement économique général et à la maîtrise de sa structure de coûts. Néanmoins le recrutement d'ingénieurs de talents est une exigence qui s'inscrit dans la durée et dont Altran ne saurait se départir. Nous continuons dans les secteurs où les besoins se font sentir. Au 30 juin 2003, l'effectif total du groupe était de 16958 personnes, en baisse de 740 personnes depuis le début de l'exercice. Ces départs sont pour l'essentiel dus à un phénomène naturel de Turn-Over.


Comment voyez-vous votre développement pour l’avenir ? 

Michel Friedlander :  Il repose essentiellement sur 3 pôles:  L’Europe où le marché demeure très fragmenté et, bien que nous soyons en position de Leader, notre taux de pénétration reste faible et nous laisse un fort potentiel de croissance. D'autre part les USA d'un côté et l'Asie de l'autre, que nous n'avons fait qu'effleurer jusqu'à présent, constituent des pôles de croissance significatifs dans les années à venir.


Peut-on déjà entrevoir quelques tendances pour les marchés de l’innovation ?

Michel Friedlander : Nous sommes prêts à tout rebond du climat économique comme nous le permet notre organisation très décentralisée. La croissance des investissements des pays industrialisés en matière de R&D est inéluctable dans la mesure où l'innovation est la clé de la compétitivité et le levier de la création de richesses et d'emplois. Les pays de l'Union Européenne ont exprimé le souhait d'amener les dépenses de R&D à 3% du PIB d'ici à 2010. Actuellement on est à moins de 2% pour l'Europe et 3% pour les USA. Nous saurons nous mobiliser en conséquence.


Une croissance à venir pour laquelle Altran pourrait bien réellement jouer un rôle majeur ?

Michel Friedlander : Passer de 2 à 3% du PIB en Europe est très ambitieux. Mais, phénomène paradoxal, on assiste à une désaffection préoccupante des étudiants pour les filières scientifiques. Dans ce contexte, la capacité d'Altran à capter les meilleurs éléments et à encourager le développement de leurs compétences va jouer un rôle fondemental.  


Arthur D. Little est maintenant dans le groupe Altran.  Un premier bilan peut-il déjà être esquissé ?

Michel Friedlander : Nous sommes très satisfaits de l’intégration d’Arthur D. Little dans le groupe et nous avons beaucoup d’estime pour eux. Ils ont su trouver leur place et l’on peut dire que le mariage est réussi. Arthur D. Little est un acteur très important du conseil en stratégie et management à forte valeur ajoutée.  Nous sommes très complémentaires. Des coopérations existent déjà, elles devraient s'intensifier à l'avenir.


Michel Friedlander, un mot de conclusion ?

Michel Friedlander :  Altran a eu la chance de contribuer à bon nombre d'avancées technologiques qui ont marquées ces 20 dernières dans des domaines aussi variés que ceux de l'automobile, les transports mais aussi la cosmétique, l'industrie du luxe où chaque jour nos équipes d'ingénieurs ménent des projets qui marquent ou marqueront notre quotidien. Je souhaite que les prochaines années permettent à Altran de faire mieux connaître du public son savoir - faire scientifique et technologique, avec l'ambition du leadership mondial.

Propos recueillis par Bertrand Villeret


Remarque: Depuis cette interview Altran Technologies peut s'enorgueillir d'avoir rapidement réalisé un des voeux de Michel Friedlander et démontré au grand public son savoir-faire scientifique et technologique grâce à un partenariat privilégié entre ses consultants et les ingénieur du Renault F1 Team ayant abouti au retour remarqué de Renault sur la plus haute marche des podiums de Formule1.

Pour Info:
www.altran.net

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Photo Michel Friedlander