L'invité de la rédaction
Juin 2009
 
FIT 2009 au Mans et au Bourget
Interview :  James R. Hansen

Professeur d'histoire de l'astronautique à l’Université d'Auburn Alabama et biographe de Neil Armstrong

James R. Hansen est professeur d’histoire de l'astronautique à l’Université d’Auburn dans l’Alabama, USA. Il a écrit de nombreux ouvrages sur des sujets aussi variés que l’histoire de l’aérodynamique aux USA (une série en 5 volumes publiée par la NASA intitulée The Wind and Beyond – Le Vent et au delà), une biographie de Neil Armstrong (First Man – le Premier Homme) et récemment un retour sur l’accident de la navette spatiale Challenger (Truth, Lies and O’Rings – Vérité, Mensonges et Joints toriques).


James R Hansen
James Hansen lors d'un exposé au Centre de recherche de la NASA de Langley, alors qu'il effectue pour l'agence fédérale des travaux d'investigation historiques à partir notamment d'archives officielles....


James Hansen était en juin l’hôte du forum FIT 2009 (Forum Innovation Transports) au Mans et au Bourget, forum organisé par l'Association pour le Prix de l'Innovation (API) en collaboration avec ConsultingNewsLine et le cabinet Nodal Consultants, représentant en France du programme TTP de l'Agence Spatiale Européenne. James Hansen à notre invitation a été tout particulièrement l’acteur clef de la commémoration du 40ème anniversaire de l’alunissage d’Apollo XI au Musée de l’Air et de l’Espace de Paris durant la semaine du Salon du Bourget. Dans l’aval du forum, Jim s’est longuement attaché à répondre pour nos lecteurs aux nombreuses questions que suscite encore aujourd’hui le programme Apollo.L'interview qui suit constitue l'intégrale des propos échangés, à l'origine en anglais, de courts extraits ayant été par ailleurs publiés depuis lors dans Le Maine Libre (19 juillet 2009), et Les Echos (21 juillet 2009, date anniversaire du premier pas sur la Lune).

 
James Hansen, nous commémorons cet été le 40ème anniversaire du premier pas de l’Homme sur la Lune. Déjà 40 ans pourrait-on dire! En tant qu’être humain qui a vécu ces années frénétiques de conquête lunaire, mais aussi en tant qu’historien qui s’est attaché à comprendre dans les détails ce sujet fort complexe, que retenez-vous d’Apollo XI et qu’est-ce que le monde d’aujourd’hui en a retenu ?

James R.  Hansen :
La semaine du premier alunissage fut un moment extraordinaire lorsque d’un seul coup le monde entier se trouva uni autour de cet événement. Même aux Etats Unis ce n’était pas tant l’idée que “nous les Américains finalement nous y étions arrivés” qui prédominait,  mais plutôt l’idée que « nous y étions arrivés ». Nous,  les êtres humains, avons ressenti que nous y étions arrivé en tant qu’espèce ! Et alors, dans le flottement particulier de l’instant où regardions deux des nôtres marcher sur un sol extraterrestre, l’humanité toute entière s'est senti rassemblée comme jamais auparavant. Malheureusement ce sentiment ne devait perdurer. Mais nous pouvons aujourd’hui nous en inspirer.


James, pouvez-vous nous rappeler quel était l’état du monde alors que ce bref et extraordinaire acte dans  l’histoire était mis en scène ? 

James R. Hansen : Le premier alunissage se déroula dans un moment particulièrement trouble. Les années qui environnaient l’été 1969 avaient été et allaient être pratiquement partout dans le monde tourmentées par des mouvements sociaux, des guerres et des conflits majeurs d’un genre ou d’un autre. Dans des moments aussi difficiles et conflictuels, il est étonnant qu’un des plus grands accomplissements de l’humanité ait pu se réaliser. D’un point de vu terre à terre on peut même se demander comment le programme d’alunissage d’Apollo ne se soit pas ramassé misérablement.


Et ce devant la Terre entière. En effet, quand on essaie de se souvenir de l’époque d’Apollo la première chose qui vient à l’esprit est le fait que chaque détail ait été porté à l’attention du public. La transparence sur le programme était totale ce qui a permis au monde entier de voir le premier pas sur la Lune en direct sur le petit écran. Comment cela a-t-il été possible ?

James R. Hansen : Ce fut un choix délibéré de la NASA qui tranchait singulièrement avec les méthodes employées pour des opérations militaires. Si tout le monde a bien vu l’homme marcher sur la Lune, lorsque les choses ont moins bien marché comme ce fut le cas pour Apollo 13, les ingénieurs se sont concentré sur les choses à faire sans perdre leur énergie à réfléchir sur ce qui devait être dissimulé. Le choix de la transparence s’est avéré payant. C’est ainsi que malgré des difficultés ultérieures la NASA a toujours conservé l’estime et la confiance du public.


A quels voyages et grandes découvertes du passé peut-on rapprocher cette conquête lunaire? La découverte des Amériques, des Indes, l’atteinte du Pole Nord ? Peut-on leurs trouver des points communs et des divergences ? 

James R. Hansen : De mon point de vue, Apollo a été la plus grande aventure du genre humain de tous les temps, parce qu’elle a été synonyme de séparation d’avec notre planète mère et de choix délibéré de s’aventurer dans ce sombre, vraiment très sombre univers qui nous entoure. Le point commun [avec les autres grandes découvertes] c’est d’avoir montré une fois de plus notre propension à explorer et notre besoin de savoir, qui sont profondément encrés dans ce que nous sommes. Notre espèce possède cette merveilleuse combinaison d’esprit faite de pragmatisme et d’amour de l’inconnu. Aussi, les alunissages ont je pense été le reflet de ce caractère essentiel à ce que nous sommes, quand bien même cela se soit-il cette fois-ci matérialisé à l’âge de la machine, dans l’ère industrielle.  


L’ère industrielle donc. Combien de personnes ont-elles été enrôlées dans le programme spatial Apollo?  Nous avons entendu dire qu’aux USA à cette époque tout le monde connaissait quelqu’un travaillant pour le programme ou au moins travaillant pour une compagnie elle-même concernée par le programme...

James R. Hansen : A son sommet, Apollo a employé jusqu’à 400 000 Américains répartis entre l’administration, l’industrie et les universités.  Environ 20 000 firmes industrielles furent impliquées  de  près ou de loin. Ma famille vivait à ce moment là dans le Midwest (Indiana) et nous ne connaissions personne qui aurait directement ou indirectement travaillé pour le programme,  mais nous connaissions des gens travaillant pour des industriels comme General Electric ou encore Magnavox qui produisaient des composants pour le programme spatial. Ces gens se sentaient vraiment concernés.


James R Hansen + Bertrand Villeret
James Hansen était en juin l’hôte du forum FIT 2009 (Forum Innovation Transports), sur le Campus Universitaire du  Mans et au Musée de l'Air et de l'Espace du Bourget, forum organisé par l'Association pour le Prix de l'Innovation (API) en collaboration avec ConsultingNewsLine et le cabinet Nodal Consultants



Ce programme qui, on le voit a impliqué une nation entière,  tient aussi son succès de sa remarquable organisation.  Peut-on en savoir un peu plus sur l’organisation de la NASA qui semble avoir fonctionné, notamment pour les prises de décisions, que ce soit en  fabrication ou en salle de contrôle et qui a assez peu changé aujourd’hui.

James R.  Hansen : La NASA a mis en place un système de prise de décisions très hiérarchisé qui s’appuyait sur une structure pyramidale comme on peut le voir avec l’équipe du contrôle de mission (Mission Control, initialement installé à Cap Canaveral puis transféré à Houston à partir du programme Gemini) laquelle comprenait des experts extérieurs au bas de la pyramide, des spécialistes au milieu, des responsables vers le haut et tout au sommet un Directeur de vol. Le « Vol », comme il était appelé, dirigeait une démocratie et une dictature en même temps. Le processus était démocratique dans le sens où il sollicitait activement les avis de ses constituants et qu’il donnait du poids à leurs conseils. Mais, le système redevenait dictatorial pour la décision finale. Afin d’aider le « Vol » et éviter le chaos les avis étaient traités dans la pyramide par des règles de procédure très strictes. Ainsi les informations étaient distillées petit à petit de par le bas, se synthétisaient et se condensant en cours de route à mesure qu’elles remontaient. A contrario les questions descendaient la pyramide pour produire des réponses satisfaisantes. Certains experts, très nombreux, étaient confinés dans des antichambres et téléphonaient leurs avis à leurs supérieurs qui se trouvaient dans la salle de contrôle principale, celle où il avait toutes ces consoles, où aboutissaient les données en provenance du vaisseau spatial, et ces cartes aux murs, illustrées tant et plus lors des retransmissions télévisées. Au centre de ce temple de la technologie le « Vol » était le grand prêtre, assisté du Capcom, un astronaute, seul autorisé à parler prioritairement à l’équipage et à relayer vers lui la sagesse accumulée… C’était un système qui s’est révélé remarquablement efficace pendant toutes les années de conquête de la Lune et ce jusqu’à aujourd’hui avec la navette spatiale. Je ne connais aucun cas où Mission Control ait donné de mauvais conseils à un vaisseau en vol. Le système s’est remarquablement prêté à la gestion de l’imprévu, notamment en temps réel mais aussi par la prise en compte en retour de l’analyse des échecs, et il y en a eu. Et ce type d’organisation était bien sûr présent sur l’ensemble de la gestion du programme, depuis l’élaboration des programmes jusqu’au développement et au test des véhicules spatiaux. Ainsi au début du programme Apollo, alors que le choix du type d’ascension faisait encore débat entre aller directement sur la Lune avec une énorme fusée (Ascension Directe), ou assembler une fusée en orbite terrestre (EOR ou Earth Orbite Rendezvous) ou encore, la voie qui sera retenue , une mise en orbite lunaire avec descente d’un petit véhicule d’alunissage (LOR Lunar Orbite Rendezvous), l’organisation de la NASA que l’on a décrit permit de promouvoir un réel débat technologique entre les contractants, les spécialistes, l’es experts de l’administration et les membres d’équipage, qui étaient tous encouragés à s’exprimer. Cette force de culture institutionnelle consistant à accepter tous les arguments techniques s’est révélée constructive. Il était possible d’exprimer son avis, aussi vigoureusement qu’on le voulait, avant que la NASA ait fait son choix. Après il fallait soutenir absolument sa décision. Là, diverses considérations, notamment budgétaires étaient prises en compte.


Comment Apollo se compare-t-il aux coûts des programmes tels que le Manhattan Project durant la seconde guerre mondiale ou encore l’actuel programme de la navette spatiale (STS Space Transportation System) ?

James R. Hansen : Apollo a coûté 24 Milliards de Dollars au contribuable américain, ce qui fut bien à l’intérieur de l’enveloppe d’estimation proposée par la NASA au Président Kennedy ($20-$40 Milliards).  Cela représente $170 Milliards en Dollars US d’aujourd’hui.  Donc se poser sur la Lune fut coûteux mais sans excès, et ne devait pas inclure de scandales budgétaires ou de dépassement faramineux. De manière intéressante, le projet américain  Manhattan qui devait conduire au développement de la bombe atomique couta grossièrement le même montant : $20 Milliards. Mais le coût total pour les Etats Unis de la seconde guerre mondiale fut bien, bien plus élevé : approximativement  $3300 Milliards.  Le simple coût de l’ensemble des  armes légères de la seconde guerre mondiale (sans inclure les munitions) fut du même niveau que le programme Apollo: $24 Milliards.  L’ensemble des bombes américaines, mines et grenades confondues coûta pareillement  $31.5 Milliards. Tous les tanks sont revenus  à $64 Milliards. Aller dans l’espace coûte donc beaucoup d’argent, mais cela n’est rien comparé à mener une guerre mondiale.


Peut-on imaginer aujourd’hui une telle implication, en termes d’investissement technologique, d’effectifs, de budgets ? Est-ce qu’un retour sur la Lune ou encore la conquête de Mars devraient conduire à des projets de même taille ou bien devront-ils présenter une envergure plus réduite, accompagnée de budgets plus limités, même si tout cela se fait dans un contexte de coopération internationale...

James R. Hansen : Aujourd’hui, avec $16.143 Milliards  (incluant le budget de la navette STS ) le budget de la  NASA ne contribue qu’à hauteur de seulement 0.58% du budget fédéral. Même durant le milieu des années 60, lorsque les dépenses d’Apollo étaient à leur apogée,  les dépenses de la NASA ne dépassèrent jamais plus de  5% du budget fédéral. Pour chaque Dollar que le gouvernement fédéral US dépense pour la NASA , il en dépense  $98 pour les programmes sociaux. Aussi en terme d’argent, les Etats Unis pourraient se permettre d’engager des dépenser sur des programmes d’exploration humaines majeurs tels que ceux vers la Lune et Mars. C’est plus une question de volonté politique et sociale qu’une question d’argent. Si le budget de la NASA  devait à nouveau atteindre les 5% du budget federal qu’il atteignait au cours des années fastes du programme Apollo, le budget atteindrait [comme Je l’ai indiqué] les $139.2 Milliards au lieu des $16Milliards mentionnés. On peut dès lors imaginé ce que l’agence spatiale pourrait faire—de manière domestique ou internationale— si elle avait ce niveau de subvention. Mais la donne veut que ce niveau de dépenses n’est tout simplement pas pour aujourd’hui—du moins tant qu’aucun facteur extérieur majeur n’entre en jeu, comme par exemple la menace d’un astéroïde pouvant entrer en collision avec notre planète.


Ou un risque plus politique peut-être? Quarante années après l’ère d’Apollo, combien différent notre monde semble être devenu ! Sur un plan politique, stratégique et sociologique, comment peut-on le caractériser ? 

James R. Hansen : Vous posez là les vraies questions ! Bien sûr, le monde a changé grandement ces 40 dernières années! Comme Thomas Friedman, journaliste du New York Times l’a écrit, le monde est maintenant  “plat”, ce qui veut dire que les gens sont reliés entre eux comme jamais ils ne l’avaient été auparavant. L’avancée exponentielle des technologies de la révolution numérique et l’abaissement des barrières commerciales et politiques ont rendu cela possible, non seulement pour le business, mais virtuellement pour toute chose, instantanément partagée par des milliards d’autres individus répartis sur la planète.  Le monde du programme Apollo  était très différent, sans aucun doute. Mais, comme je l’ai fait observer précédemment, même sans cette sorte de connectivité technologique, l’alunissage en juillet 1969 devait unir la famille humaine d’une manière fondamentale et psychique que nous ne connaissons plus aujourd’hui.  


Peut-être qu’Apollo a aussi quelque peu démythifié notre rapport à l’espace et à l’Univers ? Cela dit à une époque où certaines nations comme la Chine entrent dans le jeu international, il semble qu’une légende comme celle de la princesse chinoise égarée sur la Lune, qui fut  mentionnée durant le vol d’Apollo XI, conserve tout son sens poétique ?

James R. Hansen : Tout à fait. Selon cette légende, une princesse avala quelque pilule magique qu’elle n’était pas sensée prendre et se mit à voler de manière incontrôlée, tant et si bien qu’elle finit par "atterrir "sur la Lune. Là, elle ne trouva rien qui puisse lui tenir compagnie, à l’exception d’un petit lapin en jade... Selon la légende, la princesse ne put malheureusement jamais trouver un moyen de retourner sur Terre. Ce qui illustre bien toute la difficulté à voyager vers un autre astre minéral... Mike Collins, pilote du module de commande, fit une charmante référence à cette légende lors du voyage aller d’Apollo XI. Mais les alunissages ont depuis lors bien démythifié nos concepts relatifs à la Lune. Jusqu’à un certain point toutefois, car quelque sophistiqués que nous puissions être devenus scientifiquement et technologiquement, l’imagination humaine et son inclination à la fantasmagorie sont eux restés très puissants. Je m’attends donc sincèrement à ce que pour nos prochains voyages vers la Lune il soit à nouveau fait référence à la princesse lunaire chinoise et à son lapin de jade.


Site d'alunissage d'Eagle (Apollo 11)
Alors que le module lunaire "Eagle" survole à environ 20 km d'altitude la zone d'alunissage (Mer de la Tranquilité), une zone plate basaltique ne comportant que peu de montagnes ou de cratères éruptifs mais seulement des cratères d'impacts météoritiques, laquelle zone est encore sur cette image au niveau du "Terminator" (cette zone de séparation entre le jour et la nuit, d'où des ombres très longues qui attestent aussi bien du soleil rasant que de la forte rotonditée du petit satelllte terrestre), l'équipage se prépare à la descente finale qui durera une douzaine de minutes seulement. Lors de la prochaine révolution les astronautes alumeront leur moteur de freinage et seront sur le sol lunaire pour une "Première" qui restera gravée à jamais dans la poussière sélénite comme dans le coeur des humains...


James, nous venons de citer Mike Collins. Sur Apollo 11 il y avait aussi Buzz Aldrin et Neil Armstrong, le Commandant de bord. Neil Armstrong est quelqu’un que vous connaissez personnellement, car vous en êtes le biographe officiel.  Comment se peut-il que ce jeune et enthousiaste pilote de monomoteur d’une petite ville de l’Ohio (Wapakoneta) soit devenu le premier homme à avoir foulé le sol lunaire ? Cet événement épique devait-il changer sa vie ?

James R. Hansen : Cela m’a pris 600 pages dans mon livre, First Man – Le Premier Homme, pour répondre à cette question ! La manière la plus simple pour résumer cela, c’est de dire que la passion de Neil pour le vol et sa carrière en aéronautique et en astronautique ont avancé de concert avec l’évolution de la technologie du vol au cours du 20ème siècle, du vol subsonique au vol transonique, puis du vol supersonique jusqu’au vol hypersonique, et ce de l’avion à  moteur à piston activant une hélice jusqu’aux avions à réaction puis enfin aux fusées. Et pour ce qui est de l’alunissage qui aurait pu changer Neil, il ne me vient pas à l’esprit le nom dune personne qui ait moins été changée par cette expérience que lui. Après Apollo 11, Neil était toujours Neil ! D’une manière intéressante les éblouissants feux de la rampe qui devaient accompagner sa célébrité planétaire ne devaient qu’accentuer les caractéristiques de sa personnalité – sa modestie, son désire de mener une vie normale, son absence d’ego. C’est étonnant, mais d’une certaine manière Neil géra la chose pour rester Neil, vrai envers ce qu’il était et tout ce qu’il avait toujours été - et souhaitait rester.


 First ManEcrite par James Hansen, "First Man" est la biographie officielle de Neil Armstrong. Parue pour sa première édition en 2005 chez Simon & Shuster elle restera 3 semaines durant "Top of the Charts" de la très prisée New York Times Book Review et de ses fameux New York Times "Best Sellers".


James, vous connaissez tous les détails de la vie de Neil Armstrong et du vol d’Apollo 11, pour les avoir discutés avec lui longuement pour votre livre First Man.  J’aimerai vous poser une série de questions comme si vous étiez Neil Armstrong. Faites de votre mieux pour y répondre comme si vous étiez vraiment Neil. Voici la première : Neil Armstrong, vous avez prouvé vos capacités de pilote de combat et de pilote d’essais, ce qui inclut de nombreux vols de test avec le NACA et la NASA sur divers appareils tels que l’avion-fusée X15 et le rébarbatif Lunar Landing Training Vehicule (LLTV, appareil d’entrainement aux alunissages) dont vous avez dû vous éjecter une fois en 1968. Et là, d'un seul coup, vous êtes sélectionné comme devant être le premier homme marcher sur la Lune. Comment a-t-il put en être ainsi ?

James R. Hansen pour Neil Armstrong : Je n’ai pas été choisi pour être le premier. J’ai été choisi pour commander ce vol.  Les circonstances m’ont placé dans ce rôle particulier de commandant de la première mission d’alunissage. Si les vols précédents d’Apollo n’avaient pas été couronnés d’autant  de succès dans l’atteinte de leurs buts, alors Apollo 11 n’aurait dès lors pas été une mission d’alunissage. Elle aurait été le premier test en vol du module lunaire, en orbite terrestre, ce qu’Apollo 9  accomplit, ou encore elle aurait été la répétition en habits de l’alunissage, réussi merveilleusement bien par Apollo 10. Si l’une ou l’autre de ces deux missions avaient requit un effort supplémentaire, la première tentative d’alunissage serait revenue à Apollo 12 ou même Apollo 13. Pete Conrad aurait facilement pu commander la première mission d’alunissage et tout aussi bien être le premier homme sur la Lune. Le fait qu’Apollo11 ait été la première tentative d’alunissage traduit simplement la façon dont les choses ont fonctionné. Aussi le fait que j’ai pu être le commandant de la première mission à alunir est plus une question de chance et de timing que tout autre chose. 


James / Neil,  le premier vol piloté du programme Apollo fut Apollo 7 en October 1968. D’Apollo 7 à Apollo 11, cela ne fait que 5 missions en tout juste 14 mois! N’était-ce pas là un agenda terriblement réduit pour prétendre pouvoir assurer le succès du premier alunissage ?  Comment pouvait-on savoir que les astronautes choisis pourraient supporter un si long périple ? N’aurait-il pas fallu par ailleurs réaliser quelques tests additionnels des technologies et des systèmes embarqués sur Apollo avant de tenter ce premier alunissage ?

James R. Hansen pour Neil Armstrong : Souvenez-vous, notre but était de tenir l’engagement du Président Kennedy de poser un homme sur la Lune et de le ramener sain et sauf sur Terre  “avant que la décennie ne se termine” !  Et l’incendie d’Apollo 1 en Janvier 1967 avait retardé le programme de manière significative, même si ce délai au bout du compte devait se révéler une des clefs du succès que le programme allait rencontrer ultimement, dans la mesure où il nous avait donné des mois pour non seulement revoir le dessin du vaisseau spatial mais aussi repenser tous nos choix précédents, plans et stratégies et changer beaucoup de choses pour le meilleur. Souvenez-vous aussi que les 10 vols du programme Gemini au cours des années 1965-66 nous avaient apporté un savoir conséquent sur les vols spatiaux de longue durée, les rendez-vous et les accostages  orbitaux et les activités extravéhiculaires (EVA). Le Projet Gemini avait aussi permis à l’agence de travailler les procédures de radio communication entre vaisseaux multiples et avait entrainé de nombreuses opportunités pour toutes les personnes concernées d’accroitre leurs connaissances, leur expérience et leur niveau de confiance sur l’ensemble du programme. Pour faire court, disons qu’Apollo n’aurait pu fonctionner avec succès sans Gemini. Pour autant vous avez raison, Apollo était un programme serré (Crash Program) et beaucoup de choses ont du être réalisées très vite. 


James, il a été dit qu’Apollo avait rassemblé les meilleures technologies de son temps.  Si l’on met de côté les puissants moteurs cryogéniques de la fusée Satrun V, aurait-il été possible d’atteindre la Lune sans tous les équipements et systèmes embarqués ?  

James R.  Hansen : Le succès d’Apollo c’est aussi celui des contractants ayant mis a disposition de la NASA des instruments reposant sur de véritables prouesses technologiques pour l’époque et sans lesquels la navigation spatiale aurait été approximative et les rendez-vous spatiaux pratiquement impossibles : plateforme à inertie, radars de rendez-vous, radiocom longue distance et bien sûr les ordinateurs de bord…


Ordinateur
Peu sensible aux vibrations, embaumé dans son caisson métallique à l'abris de l'humidité, des fluctuations thermiques, des parasites électromagnétiques comme des redoutables radiations du "Vent Solaire", l'ordinateur d'Apollo XI, fabriqué par Raytheon, fût installé en deux exemplaires, l'un sur le module de commande "Columbia", l'autre sur le module lunaire "Eagle" de la Mission Apollo XI.
L'unité installée sur Comumbia (module exposé au Smithsonian Institute de Washington) est la seule à avoir survécu au périple inaugural.

 


James, peut-on justement se focaliser un moment sur cet ordinateur de bord ? Comment se comparerait-il avec les portables que tout-un-chacun utilise aujourd’hui , en termes de performances, capacités, fiabilité ?

James R.  Hansen : Un élément essentiel du succès du programme Apollo a été ses ordinateurs de bord, dans le module de commande et dans le module lunaire. Aussi primitifs qu’ils puissent nous sembler aujourd’hui, les ordinateurs de navigation étaient en fait extrêmement sophistiqués. Développé au début des années 60 pour le programme spatial par le laboratoire d’instrumentation du MIT (Massachussetts Institute of Technology) sous la direction de Charles Stark Draper et fabriqué par la société Raytheon, l’ordinateur du programme Apollo fut le premier système moderne embarqué dit « Special Purpose » à utiliser des circuits intégrés, environ 4000, et à fonctionner en « temps réel » afin de rassembler et approvisionner en données les instruments de vol et de navigation du module de commande et du module lunaire. Sur le plan des performances il a fonctionné et réalisé ce pour quoi il avait été développé. Côté fiabilité idem, on l’a bien vu lors d’Apollo XIII [remise en route après plusieurs jours passé à basse température dans l’humidité]. Mais sur le plan des capacités il a montré lors du premier alunissage qu’il était à la traîne en terme de capacité mémoire. Trop d’informations, notamment en provenance du radar d’altitude le saturait. Cela dit sans ce type d’ordinateur, l’alunissage n’aurait pas été possible et d’une certaine manière, même s’il n’était pas aussi puissant que les ordinateurs d’aujourd’hui ou même que nos calculatrices de poche et nos portables,  l’ordinateur de navigation d’Apollo a rempli pleinement son office et ouvert la voie d’un point de vue matériel et logiciel aux ordinateurs qui ont suivi sur SpaceLab et la Navette Spatiale.


Ordinateur
L'ordinateur Raytheon d'Apollo XI 'est aujourd'hui certainement la pièce de collection majeure de l'ensemble du programme Apollo. Au dela de son incroyable "blindage" (suscité), il peut être observé que dès 1969 (il y a donc 40 ans) il était déjà pourvu d'écrans électroluminescents et de touches sensitives (propres au téléphones portables d'aujourd'hui).... Il devait montrer des faiblesses de mémoire vive lors du premier alunissage mais démontrait toute sa fiabilité lors d'Apollo XIII après qu'il ait été arrêté plusieurs jours durant sans alimentation, et ce à une température assez proche de celle du milieu interstellaire. Son "rallumage" le "troisième jour" restera un grand moment de l'histoire technologique.... Sans lui, l'approche lunaire d'Apollo XI n'aurait pas été possible de même que le retour "sains et saufs" sur Terre des naufragés d'Apollo XIII.


James/Neil. Une part du succès d’Apollo semble avoir été l’introduction et l’usage de concepts avancés de fiabilité des sytèmes. Quelle pouvait-être la probabilité calculée pour Apollo 11 de se poser sur la Lune une fois que le vaisseau spatial avait été lancé ?

James R. Hansen pour Neil Armstrong :
Au milieu des années 60, le département de Support au programme Apollo de la General Electric Company en Floride devait conduire des études extensives  de fiabilité des missions pour le compte de la NASA. Ces études étaient basées sur des modèles de fiabilité des systèmes très élaborés. Un profil de fiabilité du déroulement de mission était ainsi généré par simulation sur ordinateur et de nombreuses simulations de ce type étaient réalisées pour divers scénarios. Sur la base de ces études, la probabilité de notre alunissage et d’un retour en toute sûreté sur Terre ne tomba jamais en dessous de 90%. Pour autant, un potentiel de 10% d’échec pour la mission ne signifiait pas nécessairement une catastrophe. Ces statistiques prenaient aussi en considération tous les scénarios rendant nécessaire une interruption de mission. A mon avis, et dans l’hypothèse que l’alunissage soit pour le moins tenté, les chances [d’alunir], une fois sortis de l’orbite terrestre, n’étaient toutefois pas meilleures que 50/50. Aussi pas mal de choses pouvaient encore arriver et nous forcer à interrompre la mission.


Avec toutes ces tâches devant être accomplies à bord du module lunaire Eagle et avec toutes ces alertes informatiques que vous et Buzz Aldrin avez rencontré durant la descente vers la Lune, étiez-vous prêts à tout moment à annuler la manoeuvre ? Par la suite lorsque vous avez repris en manuel les commandes pour l’approche finale, vous êtes-vous dit « je ferai mieux de le poser n’importe où ». Y a-t-il eu un instant ou vous avez pensé que là vous alliez enfin y arriver en toute sécurité ?

James R. Hansen pour Neil Armstrong : Une fois que nous avons dans les faits été en descente vers la surface lunaire mon inclination a été de continuer à aller de l’avant dès lors que tout semblait aller bien. Il n’y avait jamais eu d’abandon dans une telle situation, et annuler à ce moment là à une altitude plutôt basse n’aurait pas été une manoeuvre à faible risque. Je ne voulais pas en arriver là  sans être absolument privé de toute autre alternative. Aussi, même lorsque nous avons eu ces alarmes de programme sur l’ordinateur, aller de l’avant me semblait encore être la meilleure chose. Mais j’écoutais les contrôleurs de mission car j’avais un grand respect pour l’information et l’aide qu’ils pouvaient apporter. Mais quand vous êtes aussi bas, pourquoi vous mettre intentionnellement dans ce qui était considéré comme une situation dangereuse - un abandon – juste parce que vous avez un voyant d’alarme qui vous dit que vous pourriez avoir un problème ?


Pouvez-vous nous décrire les dernières minutes avant le contact avec le sol lunaire ?

James R. Hansen pour Neil Armstrong : Alors que la surface commençait à approcher rapidement, les repères au sol que je voyais n’étais pas ceux que j’’avais étudié ou retenu suffisamment pour savoir où ils étaient, mais je restais pragmatique sur cela. Je ne trouvais pas cela surprenant ou gênant que nous finissions dans un autre endroit que celui prévu, un peu long par rapport à ce que l’on avait prévu. De toutes façons cela aurait été étonnant au premier essai d’un alunissage si nous avions terminé très proche de l’endroit où nous souhaitions aller. Je n’avais pas du tout compté là dessus. Du point de vue de l’atteinte de l’objectif, je ne m’intéressais pas particulièrement à l’endroit où nous allions nous poser dès lors qu’il s’agissait d’un endroit correct qui n’était pas dangereux. Où cela pourrait-être m’était assez indifférent. Je me disais que nous n’aurions pour nous poser qu’à trouver l’arrière cour de quelqu’un. Initialement j’ai pensé que ce pourrait-être une bonne zone d’atterrissage si nous pouvions nous arrêter juste au bord du cratère que j’avais vu, parce que cela aurait été d’une plus grande valeur scientifique d’être proche d’un grand cratère. La pente sur le bord du grand cratère était conséquente, quoi qu’il en soit, et j’ai pensé que nous ne devions pas essayer de nous poser sur une pente aussi prononcée. Puis j’ai pensé que je pourrai peut-être éviter les gros rochers dans le champ d’éboulis, mais, n’ayant jamais posé la machine auparavant, je ne savais pas à quel point je serai capable d’entrer là dans et de manoeuvrer entre les rochers vers un point d’alunissage particulier. Essayer de s’incrire dans une cible si étroite, cela n’aurait probablement pas été du plaisir. Et puis la zone se rapprochait rapidement, et bientôt il devint évident que je ne pourrai pas m’arrêter suffisamment court pour trouver un point d’atterrissage sûr ; ce n’étais [en définitive] pas l’endroit où je voulais me poser. Mieux valait trouver une zone plus large, plus ouverte et sans danger immédiat de tous côtés. J’aurais peut-être pu être un peu plus agressif sur la rapidité avec laquelle j’ai essayé de passer au dessus du cratère, mais il ne semblait pas prudent de faire de grands mouvements en ce qui concernait l’attitude de l’appareil. Je n’avais tout simplement pas suffisamment d’expérience de vol dans la machine dans ces conditions pour savoir combien ses réactions seraient bonnes et combien je m’y sentirai à l’aise.    


Cratère courte finale
Dans moins de 30 secondes le module lunaire "Eagle" devra se poser sur la Lune faute de carburant... L'ordinateur saturé risquant de "rebouter" à tout moment, Neil Armstrong a pris le contrôle du module lunaire en "manuel". Il va lui falloir pourtant jouer au dernier moment avec ce cratère qui se présente et qui pourrait bien engloutir tous ses espoirs... Dans le doute et avec parcimonie dans le geste il préfère passer doucement au dessus. Dans quelques secondes Eagle va irrémédiablement se poser... et dans quelques heures Neil Armstrong viendra à pieds  photographier "son" cratère. Le respectueux réflexe d'un aviateur qui s'est posé dans le champ d'à côté...


Une difficulté semble donc avoir été le fait que vous ne connaissiez pas le comportement réel du module lunaire. A quel autre appareil ce module lunaire peut-il bien être comparé en terme de pilotage et de comportement à l’atterrissage? Un hélicoptère ?

James R. Hansen pour Neil Armstrong : C’était presque totalement différent du pilotage – ou du moins du contrôle – de n’importe quelle autre sorte de machine volante. Ceux qui pensaient qu’un hélicoptère ferait une bonne machine d’entrainement avaient vraiment tort. L’hélicoptère n’était en rien un bon simulateur du pilotage du module lunaire, en rien du tout.  S’il l’avait été, nous aurions probablement configuré un hélicoptère de telle manière qu’il puisse dupliquer l’alunissage – et ceci aurait pu être fait avec beaucoup moins de risques que de voler sur le  Lunar Landing Research Vehicle (LLRV) ou le  Lunar Landing Training Vehicle (LLTV). Mais on n’a jamais sorti quelque chose qui ait bien fonctionné. Les spécificités aérodynamiques naturelles d’un hélicoptère vous empêchaient de lui faire dupliquer les caractéristiques du module lunaire. L’hélicoptère était valable pour comprendre les trajectoires, les champs visuels et les taux de mouvements. Vous pouviez pratiquement dupliquer les trajectoires de vol que vous vouliez prendre ; mais il se trouve que pour ce qui est des commandes que vous utilisiez pour réaliser cela, ce n’était pas du tout les mêmes.


First Step
Dans la nuit (américaine) du 20 juillet 1969 (21 pour les Européens) Neil Armstrong dans l'ombre du module lunaire descend un à un les échelons de l'échelle placée sur le train d'atterisage avant (à l'Ouest) du module lunaire, échelons quivont l'amener au pieds du vaisseau spatial pour accomplir son  "Premier pas de l'Homme sur la Lune"... A small step for (a) Man, a Giant leap for Mankind.; Un petit pas pour l'Homme, un grand pas pour l'Humanité... Le module lunaire qui s'est posé face à l'ouest avec le soleil dans le dos place les astronautes au tout début  du jour lunaire (14 jours terrestres)... avec donc une marge de manoeuvre temporelle considérable. Leurs faibles réserves d'oxygène et d'énergie les obligeront toutefois  à repartir quelques heures plus tard...


Et pour ce qui est du niveau de carburant qui était certainement faible lorsque l’on écoute les bandes enregistrées pendant l’approche finale,  peut-on dire que le réservoir était pratiquement vide au moment de l’alunissage ?

James R. Hansen pour Neil Armstrong : Il n’y a aucun moyen de savoir combien de carburant il restait. Le bas du réservoir de carburant était sphérique, et il est très difficile d’installer un quelconque système de mesure au pied d’une surface sphérique. C’est donc très difficile de savoir combien de carburant se trouvait là, particulièrement si celui-ci se promenait dans tous les sens. La buse de sortie était sensée nous dire, pour des niveaux de poussée fixés, quand il nous ne resterait plus que 30 secondes de carburant restant. Je ne sais bien combien cela était précis ; s’il y avait du clapot vous ne pouviez savoir si le voyant s’était allumé trop tôt ou trop tard. La chose importante était que nous étions suffisamment proches de la surface pour que cela ne soit plus vraiment important.  pas vraiment. Nous n’aurions pas perdu notre contrôle d’attitude si nous avions été à court de carburant. Le moteur se serait arrêté mais, à la distance où nous nous trouvions, nous nous serions affaissés sur le sol de manière suffisamment sûre.   
 

Quelques questions plus personnelles maintenant : quand vous et Buzz avez interrompu votre activité extra-véhiculaire (EVA) et avez commencé à vous préparer à quitter la surface de la Lune, n’avez-vous pas ressenti quelques regrets à devoir quitter un endroit où vous ne reviendriez jamais ? Etiez-vous peut-être trop occupés par les tâches préparatoires du départ pour avoir quelque sentiment personnel ? est-ce que la possibilité de ne pouvoir décoller, ou bien de se perdre dans l’espace ou encore de retomber et vous écraser sur la Lune vous a traversé l’esprit ?

James R. Hansen pour Neil Armstrong : Eh bien, ces dernières [possibilités] étaient vraiment des choses peu agréables à la réflexion, et j’ai choisi autant que possible de ne pas y penser. Je ne  pensais pas que c’était des situations probables. Elles n’étaient simplement que des situations possibles qui, si elles arrivaient, nous les traiterions lorsqu’elles surviendraient. Et pour ce qui est de regretter d’avoir à quitter la Lune en tant qu’endroit où je ne reviendrai jamais, je n’étais pas sûr que cela serait le cas. A ce moment là, j’espérais voler sur d’autres missions, potentiellement susceptibles de me ramener sur la Lune. Malheureusement, je n’ai jamais eu cette chance.


Maintenant revenons vers vous, James Hansen. Que peut-on dire sur la façon dont  Neil Armstrong a pris en main son retour sur Terre et son entrée dans le statut de célébrité mondiale, voire d’une icône planétaire? Et pourquoi s’est-il toujours attaché à rester si loin des média?

James R. Hansen : Il a essayé de conserver de son mieux une vie identique à ce qu’elle avait été auparavant -en tant qu’ingénieur, astronaute, pilote d’essais... Malheureusement ni la NASA ni le public ne devaient lui permettre de vivre exactement le type de vie normale qu’il désirait. La NASA ne souhaitait pas risquer la vie de son grand héro dans un autre vol spatial, aussi Neil pris un poste d’administration des programmes aéronautiques de l’agence. Mais les circonstances ne permirent pas à Neil de réaliser le travail pour lequel il pensait avoir été embauché. A la place, il lui était demandé de se rendre aux bureaux des membres du Congrès ou d’autres notables, afin de s’y faire prendre en photo ou de signer un autographe. Rapidement il se fatigua de tout cela, se mis en retraite de la NASA, et pris un poste d’ingénierie à l’Université de Cincinnati, revenant ainsi dans son état d’origine, l’Ohio. Mais, pareillement,  il ne put mener la vie normale d’un professeur de collège universitaire et quitta ce travail à la fin des années 70.


James R Hansen + Neil Armstrong
James Hansen et Neil Armstrong dans l'aval de la rédaction de la biographie du premier Homme à avoir foulé le sol d'une autre planète, la Lune... Neil Armstrong, James Hansen,  deux jardiniers dans leur jardin des merrveilles...


James R. Hansen (suite): L’alunissage n’a pas changé Neil ; rien n’aurait put le changé. Il a toujours été trop enraciné dans ce qu’il est - et dans le type de vie qu’il voit comme méritant d’être vécue. Sa vie après Apollo devait avoir des hauts et des bas d’un point de vue personnel, mais l’intégrité de son personnage n’a jamais fluctué. Et pour cela le monde devrait se réjouir. Nous n’aimerions pas qu’il en aille autrement. C’est pourquoi j’ai débuté ma biographie "First Man" par cette citation du grand mythologue américain Joseph Campbell, « le privilège d’une vie entière c’est de la vivre en étant soi-même ». Sans aucun doute Neil a mérité de s'offrir ce privilège.

Propos recueillis par  Bertrand Villeret
Rédacteur en chef
ConsultingNewsLine



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Pour info :
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James R. Hansen

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James Hansen et Neil Armstrong :
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Images du programme Apollo : source NASA




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James R. Hansen & Neil Armstrong
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